Médailles et jetons

BnF, Cabinet des Médailles, S.R. 976

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Médailles                   Jetons

INTRODUCTION

Selon les registres de l'Académie Royale des Inscriptions, Quinault est l'inventeur des descriptions pour au moins sept des médailles qui seront réunies plus tard dans Médailles sur les principaux événements du règne de Louis le Grand, avec des explications historiques (Paris, Imprimerie Royale, 1702 et 1723 ; ce sont ce qu'on appelle les "séries uniformes" des médailles de Louis XIV), et de six des jetons gravés de 1680 à 1683.

Ces descriptions, ainsi que les images et devises, sont décrites dans un article de Josèphe Jacquiot, "Philippe Quinault, membre de la Petite Académie". Toutes les descriptions de médailles ont deux paragraphes et semblent destinés à une publication, ou au moins à une feuille de présentation pour le Cabinet des Médailles. Le premier, plus long, décrit l'événement et son importance historique. Le second est plutôt une présentation de l'image au revers de la médaille, plus détaillée que ce qu'on trouve dans les inventaires et catalogues. Il aurait pu servir de guide à l'artiste avant la frappe de la médaille, ou plus probablement -- puisqu'il explique les allégories et traduit les légendes et exergues -- au lecteur.

Il n'existe pas, pour les jetons, de descriptions aussi détaillés. Le Mercure galant les décrit brièvement dans ses numéros de janvier (voir à la fin de cette page).

Quinault intégra l'Académie Royale des Inscriptions (Petite Académie) en 1674, à une période où l'académie s'occupait plus souvent de jetons que de médailles. Le Clerc et Le Paultre soumettaient des dessins préparatoires à l'Académie, mais si des discussions en ont eu lieu, leurs traces n'ont pas été conservées.

Selon l'histoire de la Petite Académie au début de ses Registres, « On avoit fait graver la pluspart des villes Conquises par le Roy, Monsieur Colbert en donnâ la Description à faire à Mons.r Quinault, Ce Dessein n’a pas eu de suite. »

Après la mort de Colbert en 1683, Louvois et surtout Pontchartrain relancent le projet d'un catalogue de médailles célébrant les grands événements du règne. Le travaille avance rapidement, même si toutes les règles n'étaient pas encore en place, mais ce n'est qu'après la mort de Quinault que ses collègues ont pu réaliser cette "histoire métallique". Les registres de l'académie décrivent le travail de révision des devises et descriptions déjà composées, dont les sept par Quinault (1694-1698), et du catalogue (1697). C'est de ces registres que sont tirées les descriptions citées par Jacquiot :

Registre Journal des Deliberations et des Assemblées de l’Academie Royale des Inscriptions 1694-1702. Archives de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, ms. 8 vol. gr. in-fo ; consultable sur microfilm.

Il est impossible de proposer des dates précises pour les descriptions des médailles. Celles pour les ambassadeurs de Siam (1686) et le festin à l'Hôtel de Ville de Paris (1687) ont été, bien évidemment, composées dans les dernières années de la vie de Quinault (mort en novembre 1688). Les autres pourraient être de la même époque, bien que les événements décrits datent des années 1660 (les placets, les gratifications) et 1670 (le passage du Rhin, les conquêtes en Hollande, la prise de Gand). Il est possible qu'elles datent toutes des années 1685-1688, puisqu'aucune médaille de Quinault ne figure dans le catalogue de 1684 (1 AMC 14) ni dans l'inventaire de 1685 (G. 59 ; voir plus loin la liste des inventaires).

Cette datation correspond à celle proposée par Jacquiot (Médailles et jetons, p. xvi, xviii, xxxviii) : c'était entre 1685 et 1691 que l'Académie "fit des descriptions exactes [des médailles] dans le dessein de les faire graver et d'en composer un volume" (histoire de le Petite Académie, au début des Registres, reproduite par Jacquiot, p. xciii).

Quinault est probablement un des noms qui ne reviennent pas à Mabillon quand il écrit à Nicaise le 29 août 1684 : "Je crois que vous savez que l'on travaille aux devises des médailles que l'on doit faire sur les grandes actions du Roi. M. l'abbé Tallemant, M. Félibien, M. Charpentier, M. Rainssant, avec deux autres dont les noms ne me reviennent pas, sont chargés de ces devises. Ce n'est pas une petite occupation" (B.n.F, ms. fr. 9361, f. 113 ; Picard, Nouveau corpus racinianum, p. 160).

Plusieurs de ces médaillent figurent dans les inventaires conservés au Département des Monnaies, médailles et antiques de la BnF, mais ces inventaires ne donnent que la légende, l'exergue et une présentation très brève. Ces présentations sont souvent similaires au contenu du dernier paragraphe des descriptions de Quinault. Voici une liste des médailles qui figurent dans plusieurs de ces inventaires :

G. 55 (dernière médaille datée 1715) :

• Les Placets : Facilis ad Principem aditus

• La Prise de Gand : Spes et opes hostium fractae

• Les Ambassadeurs de Siam : Fama virtutis

• Le Festin à l’Hôtel de Ville : Regis et populi amor mutuus

G.57 (dernière médaille datée 1689)

• Les Placets : Facilis ad Principem aditus

• Les Gratifications des gens de lettres : Bonarum artium remuneratori

• La Prise de Gand : Spes et opes hostium fractae

• Les Ambassadeurs de Siam : Fama virtutis

• Le Festin à l’Hôtel de Ville : Regis et populi amor mutuus

G.59 (1685 ; la dernière médaille datée est de 1684) : aucune de Quinault

G.60 : (dernière médaille datée 1698 ; copie du catalogue dans les registres de la Petite Académie)

• Le Passage du Rhin : Tranatus Rhenu

• Les Conquêtes en Hollande : Ultor Regum

• La Prise de Gand : Spes et opes hostium fractae

• Les Ambassadeurs de Siam : Fama virtutis

• Le Festin à l’Hôtel de Ville : Regis et populi amor mutuus

1 AMC 14 (Catalogue des médailles fournies par La Chapelle à Rainssant pour le Cabinet des Médailles, 1684) : aucune de Quinault

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On peut donc croire, avec Jacquiot, que ces descriptions, et probablement les devises, sont de la main de Quinault, puisqu'elles furent "examinées" et "arrêtées" par la Petite Académie ; elle fit la même chose pour de nombreuses autres descriptions composées par ses membres. Il est néanmoins possible que ses collègues aient fait quelques modifications avant de transcrire la description dans le registre, mais il semble plus probable que ces modifications ont été faites entre les lectures de 1694-1698 et la publication du recueil de 1702.

La partie la plus intéressante de chaque description est le deuxième paragrahe, après "a esté arrestée" et avant la présentation de l'image, de la légende et de l'exergue. Ici, Quinault a plus de liberté dans sa façon de présenter l'événement et dans le choix des mots et des rythmes pour l'évoquer.

Plusieurs descriptions furent considérablement modifiées avant la publication du recueil Médailles sur les principaux événements du règne de Louis le Grand de1702, et encore une fois avant celle du recueil de 1723. Je vais résumer ces modifications sur la page consacrée à chaque médaille, surtout pour le premier paragraphe du recueil de 1702 (source B) ; celles du recueil de 1723 (source C) ne concernent que très indirectement Quinault, mort depuis 35 ans. On voit de nouvelles directions dans la "propagande" royale, mais ce qui m'intéresse surtout, c'est la prose de Quinault, dont on a conservé peu d'exemples. J'en proposerai plus tard quelques analyses.

Les sept médailles sont les suivantes ; le numéro de page est celui du recueil de 1702 (les pages des registres de la Petite Académie ne sont pas numérotées), mais les légendes celles du texte des registres. L'illustration de chaque médaille est celle des registres ; la légende n'est pas toujours celle donnée dans le texte (Conquêtes du roi, Festin dans l'Hôtel de Ville).

Cliquer sur le nom de chaque médaille pour le texte de la description de Quinault et une comparaison des trois versions.