Scarron

Paul Scarron (1610-1660)

Qu’estimez-vous le plus, de Clelie ou Cassandre ?

Quant à moy, le vers fort me plaist plus que le tendre.

Tout ce que fait Quinault est, ma foy, fort galant.

"Seconde Epistre chagrine à Monsieur d’Elbene", dans Scarron, Poésies diverses (éd. Maruice Cauchie, Paris, Didier, 1960), t. II, p. 215, v. 42-43

     Écrite en 1659, entre le 15 mai et le 1er août, selon cette édition

     (Clélie, roman de Mlle de Scudéry, en cours de publication depuis 1654. Cassandre, roman de Calprenède, 1642-1645)

Selon Gros, p. 76, n. 9, on peut déduire d’un passage dans une lettre de Scarron au surintendant Fouquet, publiée dans le Recueil de quelques pièces nouvelles et galantes, tant en prose qu’en vers (Cologne, Pierre du Marteau, 1663), que “Quinault ne se formalisa nullement de l’allusion de Scarron” :

“[Boileau] est le seul de tous ceux qui se sont trouvez dans ma seconde Epître chagrine qui n’a pas entendu raillerie ; […]” (p. 173).


Item, je legue au sieur Quinaut,

Sur le Tresorier Guenegaud,

Six cent livres d’enthouziasme,

Avec la doctrine d’Erasme,

La fierté des vers ampoulez

Dans des actes bien enrolez ;

Et, comme un esprit charitable

Doit assister un miserable

Je donne au Poëte crotté

Deux cens livres de vanité,

Cent livres d’antiperistase,

Une estrille à panser Pegase ;

Pour contenter sa passion,

Une feinte approbation

De ses plus ridicules œuvres,

Car il avale des couleuvres

Autant qu’on luy reprend de vers ;

Tant il a l’esprit à l’envers.

Testament, dans Scarron, Poésies diverses (éd. Maruice Cauchie, Paris, Didier, 1960), t. II, p. 269-270, v. 141-148

Publié pour la première fois dans Le Testament de M. Scarron, son épitaphe et son portrait en vers burlesques, Paris, Loyson, 1660

Je crois aussi que Monsieur l’Avant-propos m’a donné un autre sujet de plainte ; mais ce peut avoir esté sans y penser et je le luy parodnne de bon cœur : c’est d’avoir fait imprimer la Comedie des Coups de l’Amour et de la Fortune sous le nom de Monsieur Quinault. L’heureux succés de cette piece de Theatre est deu à Mademoiselle Beau-Chasteau, qui en a dressé le sujet, à feu Monsieur Tristan, qui en a fait les quatre premiers Actes, et à moy qui en ay fait le dernier, à la priere des Comediens qui me le firent faire parce que Monsieur Tristan se mouroit. Si Monsieur Quinault avoit fait les quatre premiers Actes, qui l’empeschoit de faire le dernier, que j’ay fait en deux apres-soupé de la façon qu’il se jouë sur le Theatre de L’Hostel de Bourgogne ? Je garde encore le brouillon de Mademoiselle de Beau-Chasteau et le mien.

Nouvelles tragi-comiques, Paris, Antoine de Sommaville, 1656, “A qui lira” ( préface), f. 5v et 6r. Je le cite d’après l’édition de Roger Guichemerre, Paris, Nizet, 1986, où “A qui lira” se trouve p. 31-33. Scarron se plaint d’abord de l’Avant-propos qui précède une “nouvelle pareille à ma Précaution Inutile”, dans Nouvelles amoureuses et exemplaires composées en Espagnol par cette merveille de son sexe Dona Maria de Zaya, 1656, par Antoine Le Métel d’Ouville, frère de Boisrobert. Ensuite, il se plaint d'un autre avant-propos, sans doute celui de la première édition des Coups de l'Amour et de la Fortune (1655). William Brooks croit, comme Étienne Gros, que la pièce est vraiment l'oeuvre de Quinault, même si celui-ci n'a pas mis son nom sur la page de titre. Pour Brooks (p. 75-79), Mlle Beauchâteau, comédienne à l'Hôtel de Bourgogne, aurait présenté à Tristan une esquisse de l'oeuvre de Boisrobert qu'on préparait au Théâtre du Marais, pour qu'il écrive une version rivale pour l'Hôtel. Tristan étant mourant, c'est Quinault qui fit le travail, et Scarron a pu contribuer au cinquième acte, sans savoir qu'il était de Quinault et pas de Tristan.