Parfaict
Les frères Claude & François Parfaict, auteurs du monumental Dictionnaire des théâtres de Paris (1767), soumirent ce manuscrit au censeur en 1741. Malgré la richesse de sa documentation, il ne fut jamais publié. Une édition moderne est en cours au Centre de Musique Baroque de Versailles.
La notice sur Quinault se trouve aux pages 28-30. Il est clair, vus le passage et la note marginale rayés au début, que les auteurs ont trouvé une documentation plus complète sur la jeunesse de Quinault après la première rédaction du manuscrit.
Le manuscrit se trouve à la BnF, Département des Manuscrits, NAF 6532. Il est disponible sur Gallica.
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Philippe Quinault
dont personne n’ignore ni la naissance ni les premiers emplois de la jeunesse, naquit à Paris, en 1635. Après avoir travaillé assez longtems pour le Théâtre Français, il y renonça pour épouser une riche veuve, qui ne luy donna sa main qu'à cette condition, & qui luy achetta tout de suite une charge d'Auditeur des Comptes, où il fut reçû, après bien des difficultez le 18 septembre 1671. L'année précédente, il étoit [p. 29] entré à l'Académie Françoise, à la place de M. Salomon.
Quelque déterminé que fut Quinault à ne pas s'exercer à la Poësie, il ne pût refuser à Lully quelques morceaux pour ses Ballets. Le premier Ouvrage qu'il fit dans ce genre, est la Poësie chantante de Psyché Tragédie Ballet de Molière (A) : à la reserve des paroles de la plainte Italienne, qui sont de Lully. Ce petit essay engagea ce Musicien à presser Quinault de travailler pour son Théatre, lorsqu'il eut obtenu des Lettres patentes au mois de mars 1672 : Quinault entrainé par son génie, pour ce genre d'ouvrage, se rendit aux instances de Lully, & composa la Tragédie Lyrique de Cadmus, dont nous venons de rendre compte (B), & successivement Alceste en 1674 : Thésée en 1675 : Atys en 1676 : et Isis en 1677 : Ce dernier Opera causa une espèce de disgrace à Quinault. Ses ennemis firent des applications malignes sur les principaux personnages de la pièce, de façon qu'il discontinüa son travail pendant près de deux ans. Enfin en 1680 parut Proserpine. En 1681 le Triomphe de l'Amour, Ballet. Persée en 1682 : Phaéton en 1683 : Amadis en 1684 : Roland & le Temple de la Paix en 1685, & Armide en 1686 : Qui fut le dernier ouvrage de Quinault pour l'Opera. On ne sait s'il se dégoûta de ce genre de travail, ou parce qu’il luy parut frivole, ou parce qu'il commençoit à luy coûter beaucoup de peine, car il est certain qu'il fit trois fois le V.e acte d'Armide, qui, à la vérité, est son chef-d'œuvre. Quoi qu'il en soit, il renonça à la Poësie lyrique, & Lully eut beau le solliciter à continuër, il n'en put tirer d'autre reponse que les quatre vers suivans :
Je n'ai que trop chanté les Jeux & les Amours ;
Sur un ton plus sublime, il faut nous faire entendre.
Je vous dis adieu, Muse tendre,
Et vous dis adieu, pour toûjours.
Quinault tint sa parole, & mourut le Vendredy 26 novembre 1688 : âgé de 53 ans. Il fut enterré à St.-Louis dans l'Isle, sa Paroisse, regretté de tous ses amis, & digne de l'être par la Republique des Lettres, comme le chef de la Poësie Lyrique Françoise. Il eut cinq filles de son épouse, dont trois prirent le parti du couvent, & les deux autres furent mariées, l'une à M. le Brun Auditeur des Comptes, & l'autre à M. Gaillard conseiller de la Cour des Aides.
[p. 30]
« Quinault étoit bien fait de sa personne, d'une taille élevée ; il avoit les yeux bleus, languissans & à fleur de tête ; les sourcils clairs, le front élevé, large & uni, le visage long, l'air mâle, le nez bien fait, & la bouche agréable. La physionomie d'un parfaitement honnête homme... Il parloit & écrivoit fort juste, & peu de gens pouvoient atteindre la délicatesse de ses expressions dans les conversations familieres. Son style n'étoit point recherché, au contraire c'étoit la pure nature qui parloit en luy. Il sçavoit, comme doit sçavoir un honnête homme : il étoit complaisant, sans bassesse, & disoit du bien de tout le monde... Il aimoit la satyre, mais il la vouloit fine & délicate... La passion qui le dominoit le plus, étoit l'amour ; mais il l'a toûjours conduite avec tant d'adresse, qu'il se pouvoit vanter avec justice, qu'elle ne luy avoit jamais fait faire un faux pas, malgré les emportemens qu'elle inspire d'ordinaire aux autres. Il n'y avoit rien de si tendre, & de si engageant que son tête-à-tête ; c'étoit là qu'il faisoit éclater tout son esprit, & où il en laissoit briller le feu : & il étoit le seul dont la conversation fut aussi aisée qu'agréable. Celà joint à une complaisance universelle pour le sexe, luy attiroit l'amour de toutes les femmes qu'il aimoit, ou du moins à qui il le disoit. »
NOTES EN BAS DE PAGE:
(A) « Les premières paroles que composa Quinault dans Ie genre lyrique, sont celles qui se chantent dans Psyché, Tragédie Ballet de Molière, qui fut représentée devant Louis XIV, dans la grande salle du palais des Thuileries pendant tout le carnaval de l’année 1670 : « si la Musique de Lully fut trouvée excellente, les paroles de Quinault eurent le même succès, & firent trouver insupportables celles de Perrin, qui étoit sur le point de donner sa Pastorale de Pomone, dont on avoit vû des répétitions publiques » Vie de Quinault.
(B) Lully plus fin, & plus grand connoisseur que les adversaires de Quinault, ne balança pas, après le succès de l'ouvrage, à s'attacher ce Poète, moyennant une pension de quatre mille livres, pour laquelle Quinault s'obligea de fournir tous les ans à Lully un nouveau Poëme lyrique. Ajoutons, que le feu Roy parut si content de Cadmus, « qu'il choisit seul Quinault pour composer de pareils ouvrages, en le gratifiant d'une pension de deux mille livres. Sa Majesté daignoit même, quelquefois luy en donner les sujets. » Vie de Quinault.
NOTES MARGINALES :
· En haut de chacune des trois pages, « 1673 »
· Au début, à gauche des mots rayés : « Voyez les Factums de Furetiere et le dictionnaire de Bayle à l’article Tristan. »
· P. 30, au début de la citation de la Vie de Quinault : « Vie de Quinault à la tete de ses Œuvres en 5 Volumes. »