Dédicace d'Osman

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OSMAN,

TRAGEDIE. 

Du Sieur TRISTAN

L'Hermite

Paris, Guillaume de Luynes, 1656


  Quinault fit publier cette pièce de son protecteur Tristan quelques mois après la mort de celui-ci, qui survint le 7 septembre 1655. Osman eut ses premières représentations en 1647, mais n’avais jamais été publié.

  En 1656, Roger de Rabutin, comte de Bussy (1618-1693), était connu comme militaire et comme habitué des salons parisiens. Son nom était lié à quelques débauches, mais ce ne sera qu’en 1659 qu’il commencera le long exil pendant lequel il écrira L’Histoire amourese des Gaules. À son retour à l’Académie Française en 1682, c’est Quinault qui, comme directeur de l’Académie, fut chargé de le complimenter.

  L’année 1656 est aussi celle de la publication du Fantôme amoureux de Quinault, dédié au comte de Saint-Aignan, ami et protecteur de Bussy-Rabutin. Il est parfois question des opéras de Quinault dans leur correspondance.


A

MONSEIGNEUR

LE COMTE

DE

BUSSY

LIEUTENANT GENERAL des Armées

du Roy,

Mestre de Camp General de la 

Cavalerie Françoise et estrangere, etc.


MONSEIGNEUR,

     Alors que je me suis proposé de mettre soubs vostre protection cette derniere Tragedie de feu Monsieur Tristan, je n'ay fait après sa Mort, que ce qu'il avoit dessein de faire pendant sa vie. Ma bonne fortune, qui me fit autrefois avoir quelque part dans sa confidence, me rendit le témoin de son estime pour vostre Merite et de son inclination pour vostre Personne : Je sçay qu'il a tousjours fait comme son interest propre de vostre gloire ; et qu'il a sans cesse contribué ses louanges à vostre reputation ; et ses souhaits à vostre prosperité. Si cet Homme inimitable n'avoit pas encore cessé de vivre, il ne manqueroit point icy de vous asseurer auec un stile doux et pompeux, que si vous souffrez que vostre Nom deffende cet Ouvrage, il n'aura point à craindre dans le Monde les Monstres que ses pareils ont accoustumé d'y rencontrer. Il vous diroit que l’Envie n'osera l'attaquer, le voyant sous la protection des Vertus et des Graces qui vous accompagnent, et qu'elle est aujourd'huy trop bien persuadée de la grandeur de vos qualitez éclattantes, pour ne pas respecter les choses que vous avoüez : Il exprimeroit avantageusement tous les trais admirables de vostre Cœur et de vostre Esprit. Il parleroit avec éclat de cette noble audace, qui s'est tousjours si glorieusement conservée dans les Héros de vostre Maison fameuse, et qui vous fait avancer si ardemment par tout où l’honneur vous appelle. Enfin, MONSEIGNEUR, il publieroit à toute l’Europe une vérité qui est cognuë de toute la France ; C'est qu'il y a peu de Seigneurs en ce Royaume qui soient accomplis comme vous estes, et qui puissent un jour avec plus de valeur et de succez que vous, servir aux grandes Conquestes que les Oracles promettent à nostre jeune et Incomparable Monarque. Quant à moy, quelques instructions favorables que j'aye eu l'honneur de recevoir de cet Escrivain renommé, de qui je pleure encore la perte, je ne suis pas assez éclairé pour traitter à fonds une matiere si délicatte que celle de vostre Panégyrique. Il n'estoit permis qu'au plus sçavant pinceau des Siecles passez de tirer le visage d'Alexandre, et c'estoit sans doute à la plus excellente Plume du nostre, à representer vos avantages. Je suis forcé de vous avoüer qu'il est presque impossible de bien figurer la splendeur des clartez qui nous ébloüissent comme les vostres ; et je sens bien que cet illustre Mort, dont la Memoire est immortelle, ne m’a pas laissé tout l’art dont il sçavoit vous honorer, bien qu'il m'en ait laissé tout le zèle. C'est ce qui me fait haster de me dire avec mes profonds respects.

          MONSEIGNEUR,

Vostre tres-humble et tres-

obeïssant serviteur,

QUINAULT.