Dédicace - Rivales

Les Rivales

Paris Guillaume de Luyne, 1659

   L’édition de 1659, qui fait partie d'un recueil, fut imprimée en 1655 (achevé du 1er août 1655).  Je remercie la Bibliothèque de Trinity College Dublin de m'avoir fourni une photo de ces pages.

   La page de titre de 1655 est perdue. Une édition en 1661 ne comporte pas de dédicace.]

Au marquis de Saucourt


   Charles Maximilien Antoine de Belleforière, marquis de Soyecourt (Saucourt), Grand veneur de France. Selon la tradition, peu vraisemblable selon G. Forestier (Molière, p. 178), il était l’original du chasseur Dorante dans Les Fâcheux de Molière. 

   Il dansa dans plusieurs ballets, comme le Ballet de la galanterie du temps de 1656, le Ballet d’Alcidiane de 1658, et les Plaisirs de l’Île enchantée de 1664. Il était connu pour ses succès en amour ("la belle galanterie que vous pratiquez avec tant de grâce") auxquels Benserade fait allusion dans ses vers pour les personnages. Dans ceux des Amours déguisés (1664), par exemple, où il devait représenter un démon, on lit :

Les mères sont au guet, les amants interdits,

Les maris pâles.

Contre ce fin démon voyez-vous aujourd’hui

Femme qui tienne ? (Oeuvres, Paris, Sercy, 1698, t. II, p. 272)

A  MONSEIGNEUR

MONSEIGNEUR,

LE MARQUIS

DE SAUCOURT

   MONSEIGNEUR,

   L’Aprobation que vous m’avez fait l’honneur de donner à mes RIVALLES, m’a esté si fort avantageuse, que je ne vous doy pas moins que mes RIVALLES mesmes ; & j’ose esperer que vous aurez la bonté de ne leur refuser pas vostre protection, apres leur avoir accordé si favorablement vostre estime. Toutes les personnes les plus esclairées du Royaume sont si fortement persuadées de l’excellence de vostre esprit, qu’elles ont eu sans doute de l’indulgence pour mon premier ouvrage aussitost qu’elles ont appris qu’il avait eu le bon-heur de vous plaire ; & je suis asseuré que vostre nom illustre, & vos armes fameuses ne donneront pas moins d’eclat à ce Poëme sur le papier ; [sic] que vos suffrages luy ont donné de bruit sur le Theatre. Ce n’est pas Monseigneur, que l’heureux succez de ce coup d’essay m’ait assez donné de vanité pour croire qu’il soit digne d’avoir un si glorieux protecteur que vous ; sans doute que si vous l’examinez avec rigueur, vous y rencontrerez beaucoup de defaults : Aussi lorsque j’ay fait dessein de vous l’offrir, j’ay pretendu seulement vous faire paroistre mon zele, & non pas mon merite. Tous les avantages, que j’ay essayé d’introduire avec un peu d’Art, dans les caracteres des deux Amoureux, sont beaucoup au-dessous des advantages que vous avez receus de la Nature. La grandeur de courage que temoigne Dom Fernand n’est que l’ombre de vostre valeur, les Passions & les adresses d’Alonce ne sont que de foibles & mauvais crayons de la belle galanterie que vous pratiquez avec tant de grace ; & toute la France sçait avec moy, que les RIVALLES qu’ay [sic] fait paroistre à l’Hostel de Bourgogne, ne sont pas en si grand nombre qu’és [sic] RIVALLES que vous avez fait voir à la Cour. Mais je ne m’aperçoy pas qu’en voulant vous louër je m’engage insensiblement à faire une lettre qui rempliroit plus d’un volume : vostre naissance est si fort esclatante que pour faire un simple abregé des belles actions des Heros de Vostre Illustre Maison ; [sic] il faudroit presque parler de tous les combats qui se sont donnez soubs les Regnes de tous nos Roys, & j’en aurois encore beaucoup plus à dire si je voulois marquer icy ce que vous ferez de grand pour nostre invincible Monarque. Vous avez sans doute receu moins de gloire de vostre nom fameux qu’il en doit recevoir de vous ; & l’esclat de vostre Naissance, & la grandeur de vostre Esprit, & de vostre Cœur, sont des verités si cogneuës qu’il n’est guere besoin d’en parler. Je me contenteray donc de vous supplier tres-humblement de souffrir que mes RIVALLES aient encore l’honneur de vous entretenir, & de vous asseurer que je suis avec autant de passion que de respect,

   MONSEIGNEUR

Vostre tres-humble & très-

obeïssant serviteur,

QUINAULT.