Phaéton (transcription moderne)

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PHAÉTON

TRAGÉDIE EN MVSIQUE,

REPRÉSENTÉE PAR L’ACADÉMIE ROYALE DE MUSIQUE,

Devant Sa Majesté à Versailles, le sixième jour de Janvier mil six cents quatre-vingt-trois.

On la vend A PARIS, A l’Entrée de la Porte de l’Académie Royale de Musique, au Palais Royal rue Saint Honoré.

Imprimée aux dépens de ladite Académie.

Par CHRISTOPHE BALLARD, seul Imprimeur du Roy pour la Musique.

M. DC. LXXXIII.

Avec Privilège de Sa Majesté.

ACTEURS

Du Prologue.

ASTRÉE, Déesse, fille de Jupiter et de Thémis.

Troupe de Compagnes d’Astrée.

SATURNE, Dieu qui régnait durant l’Age d’or.

Troupe de suivants de Saturne.

LE RETOUR DE L’AGE D’OR

PROLOGUE

Le Théâtre représente les Jardins du Palais de la Déesse Astrée. Astrée est au milieu de ses compagnes, qui, en dansant et en chantant, tâchent de divertir cette Déesse.

TROUPE DE COMPAGNES D ASTRÉE

Cherchons la Paix dans cet asile,

Les Jeux suivront toujours nos pas.

Quand on le veut, il est facile

De s’assurer un repos plein d’appas;

Mais les Plaisirs d’un sort tranquille

Ne cherchent point qui ne les cherche pas.

N’ayons jamais rien d’inutile;

Fuyons le bruit et l’embarras.

Quand on le veut, il est facile

De s’assurer un repos plein d’appas;

Mais les Plaisirs d’un sort tranquille

Ne cherchent point qui ne les cherche pas.

ASTRÉE

Dans cette paisible retraite,

Tout rit, tout répond à mes vœux;

Mais ma félicité ne peut être parfaite,

Que le Ciel n’ait rendu tous les mortels heureux.

Quoique leur fureur inhumaine

De leur séjour ait osé me bannir,

J’ai regret de les voir punir;

Je n’ai quitté la Terre qu’avec peine.

J’espère y voir encor le siècle fortuné

Qu’à l’Univers naissant les Dieux avaient donné.

Le sort veut que bientôt ce beau temps recommence.

La douceur de l’espérance

Doit flatter nos désirs.

Charmons notre impatience

Par d’innocents plaisirs.

Les Compagnes d’Astrée dansent et chantent.

Troupe de Compagnes d’Astrée

Dans ces lieux, tout rit sans cesse;

L’Amour veut rire avec nous.

C’est un jeu quand il nous blesse,

Nous ne sentons que ses traits les plus doux.

Qu’il est doux d’aimer sans peines!

Quel plaisir d’aimer en paix!

L’Amour fait ici des chaînes

Qui charment trop pour les briser jamais.

Saturne vient trouver Astrée, pour l’inviter à retourner avec lui sur la Terre. Ce Dieu a les mêmes suivants qui l’accompagnaient au temps de l’Age d’or: les uns dansent et les autres chantent, et Saturne même chante avec eux.

SATURNE et ses suivants

Que les mortels se réjouissent;

Que les plaintes finissent.

O l’heureux temps!

Où tous les cœurs seront contents.

SATURNE

Un Héros, qui mérite une gloire immortelle,

Au séjour des humains aujourd’hui nous rappelle.

Le siècle qui du monde a fait les plus beaux jours

Doit, sous son règne heureux, recommencer son cours.

Il calme l’Univers; le Ciel le favorise;

Son auguste sang s’éternise.

Il voit combler ses vœux par un Héros naissant ;

Tout doit être sensible au plaisir qu’il ressent.

Les Muses vont lui faire entendre

Mille nouveaux concerts.

De sa grandeur il se plaît à descendre.

Il sait mêler les Jeux à cent travaux divers;

Rien ne peut nous troubler, la Discorde est aux fers.

L’Envie en vain frémit de voir les biens qu’il cause;

Une heureuse paix est la loi

Que ce vainqueur impose.

Son tonnerre inspire l’effroi

Dans le temps même qu’il repose.

ASTRÉE

Suivons ce Héros, suivez-nous,

Jeux innocents, rassemblez-vous.

Régnez dans une paix profonde.

Rappelez l’heureux temps de l’enfance du monde.

Jeux innocents, rassemblez-vous,

Reprenez pour jamais vos charmes les plus doux.

La Suite de Saturne et celle d’Astrée chantent et dansent ensemble.

LES CHŒURS

Jeux innocents, rassemblez-vous;

Reprenez pour jamais vos charmes les plus doux.

Plaisirs, venez sans crainte,

Venez vous rassembler;

Le Soin et la Contrainte

Ne viendront plus vous troubler.

Le plus grand des Héros

Vous reçoit dans son Empire.

Que tout l’Univers admire

L’auteur d’un si doux repos.

Il faut que tout fleurisse.

Mortels, vivez heureux.

La Paix et la Justice

Vont régner avec les Jeux.

Le plus grand des Héros

Les reçoit dans son Empire.

Que tout l’Univers admire

L’auteur d’un si doux repos.

SATURNE, ASTRÉE, et LES CHŒURS

On a vu ce Héros terrible dans la guerre.

Il fait, par sa vertu, le bonheur de la Terre.

Sa victoire l’a désarmé;

Il fait son bonheur d’être aimé.

Fin du Prologue.

ACTEURS

De la Tragédie

LIBIE, fille de Mérops, Roi d’Égypte.

THÉONE, fille de Protée.

PHAÉTON, fils du Soleil et de Climène.

CLIMÈNE, fille de l’Océan et de Thétis.

PROTÉE, Dieu Marin, Conducteur des troupeaux de Neptune.

Troupe de suivants de Protée.

TRITON, Dieu Marin, frère de Climène.

Troupe de suivants de Triton.

ÉPAPHUS, fils de Jupiter et de la Déesse Isis.

MÉROPS, Roi d’Égypte, qui a épousé Climène après la mort d’une première épouse, dont il a eu Libie

Troupe d’Égyptiens et d’Égyptiennes.

Un Roi Éthiopien, tributaire de Mérops.

Troupe d’Éthiopiens et d’Éthiopiennes.

Un Roi Indien, tributaire de Mérops.

Troupe d’Indiens et d’Indiennes.

Troupe de Prêtresses de la Déesse Isis.

Troupe de jeunes personnes choisies pour porter des offrandes au Temple d’Isis.

Des Furies, et des Fantômes terribles.

Les Vents.

Le Soleil.

Les Heures du jour.

Les Saisons de l’année.

Quatre Quadrilles, dont chacun accompagne une des quatre Saisons.

Troupe de Pasteurs Égyptiens.

Troupe de Bergères Égyptiennes.

LA DÉESSE DE LA TERRE.

JUPITER.

ACTE PREMIER

Le Théâtre représente un jardin sur le devant, une grotte dans le milieu, et la mer dans l’éloignement.

SCENE PREMIERE

LIBIE, seule

Heureuse une âme indifférente!

Le tranquille bonheur, dont j’étais si contente,

Ne me sera-t-il point rendu?

Dans ces beaux lieux tout est paisible;

Hélas! que ne m’est-il possible

D’y trouver le repos que mon cœur a perdu?

SCENE SECONDE

THÉONE, LIBIE

THÉONE

Je ne vous croyais pas dans un lieu solitaire.

Une pompeuse Cour ne songe qu’à vous plaire,

Et vous venez rêver ici?

LIBIE

Vous y venez rêver aussi.

THÉONE

J’aime, c’est mon destin d’aimer toute ma vie.

Votre cœur fuit l’Amour, et croit s’en garantir.

Il faut aimer pour ressentir

Le charme de la rêverie.

LIBIE

Le Roi doit aujourd’hui me choisir un époux.

Ai-je moins à rêver que vous?

THÉONE

M’est-il permis d’entrer dans votre confidence?

LIBIE

La sincère amitié doit bannir d’entre nous

Le mystère et la défiance.

THÉONE

Pourquoi chercher des lieux où règne le silence?

Est-il un spectacle plus doux

Que de voir mille amants empressés et jaloux,

Dont votre Hymen fait l’espérance?

Je commence à douter que vous les voyiez tous

Avec la même indifférence.

LIBIE

Je suis la fille d’un Roi qui commande à des Rois;

Après lui, j’aurai sous mes lois

Les pays où le Nil répand son eau féconde.

Un grand destin m’est préparé,

Mais le premier trône du monde

N’est pas contre l’Amour un asile assuré.

THÉONE

Le fils de Jupiter vous aime.

LIBIE

Je ne serais qu’à lui, si j’étais à moi-même.

Mon cœur s’est trop pressé de choisir un vainqueur,

Et mon timide amour craint un devoir sévère.

Que deviendrai-je, ô Ciel! si le choix de mon père

Ne suit pas le choix de mon cœur?

Vous ressentez l’amour sans éprouver ses peines;

Le fils du Dieu brillant qui donne la clarté ,

Tout fier qu’il est, porte vos chaînes;

Vous aimez Phaéton avec tranquillité.

THÉONE

Hélas! un tendre cœur est toujours agité.

La mer est quelquefois dans une paix profonde;

On peut, après l’orage, y jouir d’un beau jour.

Le calme règne plus dans l’Empire de l’Onde

Que dans l’Empire de l’Amour.

LIBIE et THÉONE

Ah! qu’il est difficile

De bien aimer

Sans s’alarmer!

Ah! qu’il est difficile

Que l’Amour soit tranquille.

THÉONE

Phaéton est pour moi peu sensible aujourd’hui.

Que je crains...

LIBIE

Je vous laisse éclaircir avec lui.

SCENE TROISIEME

PHAÉTON, THÉONE

THÉONE

Vous passez sans me voir! craignez-vous ma présence?

PHAÉTON

Je vous aime, Théone, et ce soupçon m’offense.

THÉONE

Que ma vue aujourd’hui vous cause d’embarras!

Avouez qu’en ces lieux vous ne me cherchiez pas.

PHAÉTON

Je cherchais la Reine ma mère.

Ce soin pourrait-il vous déplaire?

Devez-vous me le reprocher?

THÉONE

C’est toujours ne me pas chercher.

Je m’aperçois sans cesse

Que quelque soin vous presse,

Et par malheur je m’aperçois

Que ce soin n’est jamais pour moi.

PHAÉTON

Une autre amour, à votre espoir fatale,

N’a pas causé mes nouveaux soins.

Je n’aime point ailleurs, les Dieux m’en sont témoins.

THÉONE

Vous changez, cependant, ma peine est sans égale;

Peut-être souffrirais-je moins

Si je pouvais haïr une rivale.

Protée, à qui je dois le jour,

Du plus sombre avenir perce la nuit obscure.

Il m’a prédit cent fois le tourment que j’endure.

Vous ne me parlez plus ni d’hymen, ni d’amour;

De tant de vains serments vous perdez la mémoire.

PHAÉTON

Non, je vous aimerai toujours.

THÉONE

Ingrat, le moyen de vous croire?

Vos regards inquiets démentent vos discours.

Avec trop peu de soin votre froideur se cache;

Le bonheur de ma vie à votre cœur s’attache,

Vous me laissez trop voir qu’il cherche à m’échapper;

Ah! du moins, ingrat que vous êtes,

Puisque vous me voulez tromper,

Trompez-moi mieux que vous ne faites.

PHAÉTON

Je ne sais plus comment pouvoir calmer

Mille frayeurs qui viennent vous surprendre.

Mon cœur vous aime autant qu’il peut aimer;

S’il n’est pas assez tendre,

C’est à l’Amour qu’il s’en faut prendre.

THÉONE

Quand vous commenciez d’être amant,

Vous me cherchiez avec empressement,

Vous ne me quittiez point sans une peine extrême.

Le souvenir fatal d’un amour si charmant

Ne sert qu’à faire mon tourment;

Vous ne savez que trop comme il faut que l’on aime;

Ah! deviez-vous m’aimer si tendrement,

Si vous ne vouliez pas m’aimer toujours de même?

PHAÉTON

La Reine tourne ici ses pas.

THÉONE

Suivez la Reine, allez, ne vous contraignez pas.

SCENE QUATRIEME

CLIMÈNE, PHAÉTON

CLIMÈNE

Vous paraissez chagrin, mon fils; ne puis-je apprendre

D’où vient le trouble où je vous vois?

PHAÉTON

Le Roi va faire choix d’un gendre;

L’époux de la Princesse un jour doit être Roi.

Le superbe Épaphus à cet honneur aspire.

Ah! faudra-t-il le voir Maître de cet Empire?

Faudra-t-il nous voir sous sa loi?

Quelle honte pour vous! quelle rage pour moi!

Le Roi fera tout pour vous plaire...

CLIMÈNE

Mais quel autre choix doit-il faire?

Le fils de Jupiter est-il à dédaigner?

PHAÉTON

Quoi, votre fils, le fils du Dieu qui nous éclaire,

Est-il indigne de régner?

CLIMÈNE

Votre gloire, mon fils, est mon unique envie.

Après l’amour du Dieu dont vous tenez la vie,

Jusqu’à l’hymen d’un Roi j’eus peine à m’abaisser;

Mais pour vous mettre au trône il fallait m’y placer.

Le Roi veut vous offrir sa fille et sa couronne.

Je sais que vous aimez Théone,

Et c’est cet amour que je crains.

Profitez du bonheur que je mets en vos mains,

Méritez la grandeur suprême.

Vaincre un amour charmant est un effort extrême;

Mais qui veut s’élever au-dessus des humains,

Doit être maître de lui-même.

Il ne tiendra qu’à vous de régner en ces lieux.

PHAÉTON

J’entends mon destin qui m’appelle,

Je brûle de monter dans un rang glorieux.

Si Théone me paraît belle,

La couronne est encor plus charmante à mes yeux.

CLIMÈNE

J’aime ces sentiments d’une âme noble et fière;

Ils sont dignes du fils du Dieu de la lumière.

D’une amoureuse ardeur un grand cœur peut brûler,

C’est un amusement qu’il faut qu’on lui pardonne;

Mais il faut que l’amour soit prêt à s’immoler

Sitôt que la gloire l’ordonne.

Tout est favorable à mes vœux,

Et cependant ma joie est inquiète.

Mille présages malheureux

Troublent mon cœur d’une crainte secrète.

C’est ici que Protée amène les troupeaux

Du Dieu de l’Empire des Eaux.

Il se plaît sous ce frais ombrage.

L’avenir est pour lui sans ombre et sans nuage.

Je veux sur votre sort le contraindre à parler,

Empêchez qu’en ces lieux on me vienne troubler.

SCENE CINQUIEME

Protée sort de la mer; il conduit les troupeaux de Neptune, et il est accompagné d’une troupe de Dieux marins.

PROTÉE, suivants de Protée

PROTÉE

Heureux, qui peut voir du rivage

Le terrible Océan par les vents agité!

Heureux, qui dans le port peut plaindre en sûreté

Ceux qui sont dans l’horreur d’un dangereux orage!

Plaignons les malheureux amants,

Évitons leurs cruels tourments.

Gardons-nous de souffrir que l’Amour nous engage

Dans ses trompeurs enchantements;

Gardons-nous des embarquements

Où le repos du cœur fait un fatal naufrage.

Plaignons les malheureux amants,

Évitons leurs cruels tourments.

Prenez soin sur ces bords des troupeaux de Neptune.

Je veux fuir du Soleil la chaleur importune.

Ici, l’ombre des bois, le murmure des flots,

Tout invite à goûter la douceur du repos.

Protée s’endort dans la grotte, et ses suivants s’écartent sur le rivage, où ils vont prendre soin des troupeaux de Neptune.

SCENE SIXIEME

CLIMÈNE, PROTÉE endormi

CLIMÈNE

Vous, avec qui le sang me lie,

Triton, secondez mon envie;

Donnez-moi le secours que vous m’avez promis.

Des décrets du destin Protée a connaissance,

Faites-lui rompre le silence

Qu’il s’obstine à garder sur le sort de mon fils.

Climène se retire.

SCENE SEPTIEME

TRITON, suivants de Triton, PROTÉE

Triton sort de la mer accompagné d’une Troupe de Dieux marins, dont une partie fait un concert d’instruments, et l’autre partie danse. Ils éveillent Protée et l’invitent à prendre part à leurs divertissements. Triton chante au milieu de ses suivants.

TRITON

Que Protée avec nous partage

La douceur de nos chants nouveaux.

C’est de tous les Pasteurs le Pasteur le plus sage.

Paissez, heureux troupeaux

Du Dieu des Eaux,

Paissez en paix sur ce rivage.

Que Protée avec nous partage

La douceur de nos chants nouveaux.

Chantons sous cet ombrage;

Répondez-nous, charmants oiseaux;

Joignez à nos concerts votre plus doux ramage.

Que Protée avec nous partage

La douceur de nos chants nouveaux.

Les suivants de Triton continuent leurs concerts d’instruments et leurs danses, et Triton y joint une chanson qu’il chante en s’adressant à Protée.

Le plaisir est nécessaire.

La sagesse austère

Peut empêcher d’y courir;

Mais la plus sévère

Ne refuse guère

Le plaisir qui vient s’offrir.

Les suivants de Triton environnent Protée en dansant.

PROTÉE

Vos jeux ont des appas; je les quitte avec peine;

Mais mon troupeau s’éloigne de ces lieux.

TRITON

Du sort de Phaéton éclaircissez Climène;

De grâce, contentez son désir curieux.

PROTÉE

Ne me pressez point d’en trop dire.

Le Sort dans l’avenir permet que j’ose lire,

Mais, sous un silence discret,

Le Sort veut qu’avec soin je garde son secret.

Protée disparaît, et se transforme successivement en lion, en arbre, en monstre marin, en fontaine, et en flamme. Mais sous ces formes différentes, il est suivi et environné par les suivants de Triton.

TRITON

C’est un secret qu’il faut qu’on vous arrache.

Vous vous transformez vainement.

Nous vous suivrons avec empressement

Sous quelque forme qui vous cache.

Non, ne croyez pas nous tromper,

N’espérez pas nous échapper.

Non, de ces changements l’étonnant artifice

N’aura rien qui nous éblouisse.

Non, ne croyez pas nous tromper;

N’espérez pas nous échapper.

SCENE HUITIEME

TRITON, CLIMÈNE, suivants de Triton, PROTÉE

TRITON

Il reviendra bientôt dans sa forme ordinaire.

Ma sœur, venez l’entendre, il cède à notre effort.

Il va de votre fils vous déclarer le sort.

Protée, après plusieurs transformations, reprend enfin sa forme naturelle.

PROTÉE

Puisque vous m’y forcez, il faut ne vous rien taire.

Le sort de Phaéton se découvre à mes yeux.

Dieux! je frémis! que vois-je? ô Dieux!

Tremblez pour votre fils, ambitieuse mère!

Où vas-tu, jeune téméraire?

Tu dois trouver la mort dans la gloire où tu cours.

En vain le Dieu qui nous éclaire,

En pâlissant pour toi, se déclare ton père;

Il doit servir à terminer tes jours.

Tu vas tomber, n’attends plus de secours.

Le Ciel fait tonner sa colère.

Tremblez pour votre fils, ambitieuse mère.

TRITON

Quel oracle!

CLIMÈNE

Quelle terreur!

TRITON et CLIMÈNE

Ah! je me sens saisir d’horreur!

Fin du premier Acte.

ACTE SECOND

Le Théâtre change, et représente un endroit du Palais du Roi d’Égypte, orné et préparé pour une grande cérémonie.

SCENE PREMIERE

CLIMÈNE, PHAÉTON

CLIMÈNE

Protée en a trop dit, je frémis du danger

Qu’il prévoit et qu’il vous annonce.

PHAÉTON

A l’hymen de sa fille il me veut engager;

Son intérêt a dicté sa réponse.

CLIMÈNE

Je vois que j’ai trop entrepris.

PHAÉTON

Quoi, ma grandeur n’est pas votre plus chère envie?

CLIMÈNE

Il vous en coûterait la vie,

Je ne veux point pour vous de grandeur à ce prix.

PHAÉTON

Protée a-t-il le droit suprême

De donner des arrêts ou de vie ou de mort?

Est-ce à lui de régler mon sort?

Un cœur comme le mien fait son destin lui-même.

Croyez-en mon courage, il doit vous rassurer.

CLIMÈNE

Vous êtes digne de l’Empire,

Mais si votre grand cœur me force à l’admirer,

C’est en tremblant que je l’admire.

Vivez, et bornez vos désirs

Aux tranquilles plaisirs

D’une amour mutuelle.

Aimez, contentez-vous

De régner sur un cœur fidèle,

Il n’est point d’empire plus doux.

PHAÉTON

Vous m’en désavoueriez si je pouvais vous croire.

Je veux me faire un nom d’éternelle mémoire,

J’ai déjà trop langui dans un honteux repos;

La plus forte amour d’un Héros

Doit être l’amour de la Gloire.

CLIMÈNE

Vous êtes menacé du céleste courroux,

Et j’entends la foudre qui gronde.

PHAÉTON

Élevez votre fils au premier rang du monde,

Laissez tonner les Dieux jaloux.

CLIMÈNE

Une secrète voix, qui dans mon cœur murmure,

Me dit que le trépas au trône vous attend;

Puis-je n’écouter point la voix de la Nature?

PHAÉTON

Le fils du Dieu du Jour doit être plus content

D’un trépas éclatant,

Que d’une vie obscure.

CLIMÈNE

J’espère que l’Amour pourra vous arrêter;

Théone vient, je me retire.

PHAÉTON

Non, non, je ne puis vous quitter

Que vous ne m’assuriez du bonheur où j’aspire.

SCENE SECONDE

THÉONE seule

Il me fuit, l’inconstant! il m’ôte tout espoir.

O Ciel! tant de froideur succède à tant de flamme!

Ah! que n’a-t-il toujours évité de me voir!

Qu’il aurait épargné de tourments à mon âme!

Sur la foi des serments dont il flattait mes vœux,

J’espérais un destin heureux;

Je croyais pour toujours nos cœurs d’intelligence;

Je m’assurais que jamais l’inconstance

Ne briserait de si beaux nœuds.

Ah! qu’il est dangereux

De s’engager sur la vaine assurance

Des serments amoureux!

L’infidèle attendait, pour éteindre ses feux,

Qu’il m’en eût fait sentir toute la violence.

Que le charme fatal d’une douce espérance

Expose un cœur crédule à des maux rigoureux!

Ah! qu’il est dangereux

De s’engager sur la vaine assurance

Des serments amoureux!

SCENE TROISIEME

LIBIE, THÉONE

LIBIE

Que l’incertitude

Est un rigoureux tourment!

Non, on n’a point en aimant

De peine plus rude

Que l’incertitude.

Je sens croître à tout moment

Mon inquiétude.

Que l’incertitude

Est un rigoureux tourment!

THÉONE

Que ma disgrâce, hélas! n’est-elle encor douteuse!

Vous espérez de voir vos désirs satisfaits;

Vous pouvez être heureuse,

Et je ne le serai jamais.

Dans mes malheurs, que faut-il que j’espère?

J’aime un ingrat qui trahit nos amours;

Et je sens, malgré ma colère,

Que tout ingrat qu’il est, je l’aimerai toujours.

LIBIE

Mon sort était digne d’envie,

Avant que par l’Amour mon cœur fût tourmenté.

THÉONE

Nous ne savons le prix de notre liberté

Qu’après qu’elle nous est ravie.

LIBIE et THÉONE

Amour, cruel vainqueur,

Ah! pourquoi troublais-tu le repos de ma vie?

Amour, cruel vainqueur,

Ah! pourquoi troublais-tu le repos de mon cœur?

LIBIE

J’attends le choix du Roi.

THÉONE

Je vais cacher mes larmes.

LIBIE

Mon cœur est agité de mortelles alarmes;

Le Roi déjà peut-être a nommé mon époux...

Vous me laissez?

THÉONE

Je laisse Épaphus avec vous.

SCENE QUATRIEME

ÉPAPHUS, LIBIE

ÉPAPHUS

Quel malheur!

LIBIE

Dieux! quelle tristesse!

ÉPAPHUS

Quel malheur! quel supplice! hélas!

LIBIE

Que vous alarmez ma tendresse!

ÉPAPHUS

Je vous perds, charmante Princesse,

Quel malheur! quel supplice, hélas!

De perdre un bien si plein d’appas!

C’est en vain que pour moi votre cœur s’intéresse.

Le Roi m’a prononcé l’arrêt de mon trépas;

Votre époux est choisi, je ne le serai pas;

Je vous perds, charmante Princesse,

Quel malheur! quel supplice, hélas!

De perdre un bien si plein d’appas!

Se peut-il qu’une loi si dure

Ne vous arrache aucun murmure?

Un doux espoir m’a-t-il trompé?

Belle Princesse, est-il possible

Que votre cœur soit insensible

Au coup mortel qui m’a frappé?

LIBIE

Votre douleur n’a point à craindre

De blesser du Devoir les droits trop absolus;

Votre amour malheureux se plaint sans se contraindre;

Mais l’amour qui se plaint le plus

N’est pas toujours le plus à plaindre.

ÉPAPHUS

Divinités dont j’ai reçu le jour,

Voyez mon désespoir, et vengez mon amour;

Contre un Roi si cruel armez votre colère...

LIBIE

Ah! tout cruel qu’il est, songez qu’il est mon père;

N’attirez point sur lui le céleste courroux.

ÉPAPHUS

Vous ne demandez point qui sera votre époux?

LIBIE

Hélas! pour m’accabler, c’est assez de connaître

Que je ne serai pas à qui je voudrais être.

ÉPAPHUS

Phaéton est choisi...

LIBIE

Trop rigoureuse loi!

Ah, qu’il m’en coûtera de larmes!

ÉPAPHUS

Que le bien qu’il m’ôte a de charmes!

Il n’en connaîtra pas le prix si bien que moi.

LIBIE

Funeste choix!

ÉPAPHUS

Douleur mortelle!

LIBIE

Jour infortuné!

ÉPAPHUS

Jour affreux!

LIBIE et ÉPAPHUS

O sort trop malheureux

D’un amour si fidèle!

ÉPAPHUS

Votre cœur peut-il suivre une loi si cruelle?

LIBIE

Mon cœur tremble, soupire, et se sent déchirer;

Mais il doit obéir, en dût-il expirer.

ÉPAPHUS et LIBIE

Faut-il que le Devoir barbare

Pour jamais nous sépare?

ÉPAPHUS

Je vous perdrai dans un moment.

L’Amour, le tendre Amour gémira vainement;

Vous l’abandonnerez.

LIBIE

Que ne puis-je le suivre!

ÉPAPHUS

Faut-il que ce que j’aime à mon rival se livre?

LIBIE

Plaignez-moi de souffrir un si cruel tourment.

ÉPAPHUS

Vous vivrez pour un autre amant,

Et sans vous je ne saurais vivre.

LIBIE et ÉPAPHUS

Que mon sort serait doux

Si je vivais pour vous!

Épaphus se retire.

SCENE CINQUIEME

LIBIE, MÉROPS, CLIMÈNE, PHAÉTON,

un Roi Éthiopien, un Roi Indien, Troupe d’Égyptiens et d’Égyptiennes, Troupe d’Éthiopiens et d’Éthiopiennes, Troupe d’Indiens et d’Indiennes

MÉROPS

Rois, qui pour Souverain devez me reconnaître,

Et vous, peuples divers, dont les Dieux m’ont fait maître,

Soyez attentifs à ma voix.

Dans ma vieillesse languissante,

Le sceptre que je tiens pèse à ma main tremblante;

Je ne puis sans secours en soutenir le poids.

Pour le Fils du Soleil mon choix se détermine;

C’est Phaéton que je destine

A tenir, après moi, l’Égypte sous ses lois.

J’accorde à ce Héros ma fille qu’il demande.

Que de tous côtés on entende

Le nom de Phaéton retentir mille fois.

Est-il pour nous une gloire plus grande?

Le sang des Dieux s’unit au sang des Rois.

Mérops, Climène, Phaéton, et Libie se placent sur un trône, et les Peuples témoignent leur joie par des danses, où ils mêlent des acclamations en faveur de Phaéton.

LE CHŒUR

Que de tous côtés on entende

Le nom de Phaéton retentir mille fois.

Est-il pour nous une gloire plus grande?

Le sang des Dieux s’unit au sang des Rois.

Fin du second Acte.

ACTE TROISIEME

Le Théâtre change, et représente le Temple d’Isis.

SCENE PREMIERE

THÉONE, PHAÉTON, suivants de Phaéton

THÉONE

Ah! Phaéton, est-il possible

Que vous soyez sensible

Pour une autre que moi?

Ah! Phaéton, est-il possible

Que vous m’ayez manqué de foi?

Tout m’annonce un malheur dont je frémis d’effroi.

Si vous me trahissez, ma mort est infaillible.

Nous devions vivre heureux sous une même loi;

Avec ce que l’on aime, un sort doux et paisible

Vaut bien le sort du plus grand Roi.

Ah! Phaéton, est-il possible

Que vous soyez sensible

Pour une autre que moi?

Ah! Phaéton, est-il possible

Que vous m’ayez manqué de foi?

PHAÉTON

Pour régir l’Univers les Destins m’ont fait naître;

Si l’Amour m’en rendait le maître,

Que mon bonheur serait charmant!

Pour être heureux parfaitement,

Ce serait avec vous que je le voudrais être.

THÉONE

L’hymen de la Princesse a pour vous des appas;

Vous l’aimez, votre cœur m’oublie.

PHAÉTON

Non, la seule grandeur avec elle me lie,

Et l’Amour ne s’en mêle pas.

THÉONE

Quoi, malgré ma douleur mortelle,

Au mépris de mes pleurs, votre cœur infidèle

Rompt des nœuds qui devaient à jamais nous unir?

La couronne vous parût-elle

Cent fois encor plus belle,

Quel bien peut être doux, quand il faut l’obtenir

Par une trahison cruelle?

PHAÉTON

Aux lois de mon destin j’ai regret d’obéir,

Je suis touché de votre peine.

THÉONE

Hélas! vous me plaignez, et vous m’allez trahir!

Vous m’offrez une pitié vaine.

PHAÉTON

Punissez-moi par votre haine.

THÉONE

Ai-je un cœur fait pour vous haïr?

PHAÉTON

Je suis indigne de vous plaire;

Je mérite votre colère,

Je ne mérite pas les pleurs que vous versez.

THÉONE

Perfide, il est donc vrai que vous me trahissez!

Témoin de ma constance,

Et de son changement,

Ciel, qui vois la cruelle offense

Que me fait ce parjure amant,

O Ciel! j’implore ta vengeance.

Que la foi méprisée arme les justes Dieux;

Que l’Amour soit vengé; qu’il allume la foudre;

Que ce superbe ambitieux

Tombe avec sa grandeur et soit réduit en poudre...

Que dis-je! malheureuse! hélas!

Ce perfide m’est cher encore,

Et je mourrais de son trépas.

Justice du Ciel que j’implore,

Dieux vengeurs, ne m’exaucez pas.

Vous voyez ma faiblesse extrême,

Ingrat, vous triomphez de mon juste courroux.

Non, si je me venge de vous,

Ce ne sera que sur moi-même.

SCENE SECONDE

PHAÉTON, suivants de Phaéton

PHAÉTON

Suivez-la, ma présence irrite ses douleurs.

Je plains ses malheurs,

Je m’attendris par ses larmes;

Ah! que de beaux yeux en pleurs

Ont de puissants charmes!

Je n’avais jamais vu l’éclat du sort des Rois

Quand je m’engageai sous ses lois;

Rien n’était à mes yeux si beau qu’un amour tendre.

La Grandeur m’appelle aujourd’hui,

L’Amour me parle en vain, je ne puis plus l’entendre,

La fière Ambition parle plus haut que lui.

L’Égypte adore Isis; la coutume m’engage

A rendre un solennel hommage

A son divin pouvoir,

Acquittons-nous de ce devoir.

SCENE TROISIEME

ÉPAPHUS, PHAÉTON, suivants de Phaéton

ÉPAPHUS

Songez-vous qu’Isis est ma mère?

Jusqu’au temple où l’on la révère,

Venez-vous insulter à son fils malheureux?

PHAÉTON

Par nos offrandes, par nos vœux,

Nous allons calmer sa colère.

ÉPAPHUS

Vous m’ôtez un bien qui m’est dû;

Croyez-vous qu’à vos vœux le juste Ciel réponde?

PHAÉTON

Peut-il à mes désirs avoir mieux répondu?

Je deviens le maître du monde.

Quel sort est plus beau que le mien?

Est-il une gloire plus grande?

Non, que les Dieux ne m’ôtent rien,

C’est tout ce que je leur demande.

ÉPAPHUS

Votre orgueil pourrait s’abuser;

Un rival tel que moi n’est pas à mépriser.

PHAÉTON

Tout suit mes désirs, tout me cède;

Que peut votre vain désespoir?

Il ne sert qu’à me faire voir

Le prix du bien que je possède;

Plus mon rival est jaloux,

Et plus mon bonheur est doux.

ÉPAPHUS

Craignez le Dieu dont je tiens la naissance;

Craignez son foudroyant courroux.

PHAÉTON

Je me flatte de l’espérance

Que tous les Dieux ne seront pas pour vous.

Mon père est le Dieu favorable

Qui répand le jour en tous lieux.

Tout s’anime par lui, sans lui, rien n’est aimable;

Sans son divin éclat, une nuit effroyable

Couvrirait à jamais nos yeux.

Non, rien n’est comparable

Au destin glorieux

Du plus brillant des Dieux.

ÉPAPHUS

Mon père est le Dieu redoutable

Qui régit la Terre et les Cieux;

Il peut, quand il lui plaît, d’un coup inévitable,

Renverser les audacieux.

Non, rien n’est comparable

Au destin glorieux

Du plus puissant des Dieux.

Phaéton et Épaphus répètent ensemble les trois derniers vers qu’ils ont chantés.

PHAÉTON et ÉPAPHUS

Non, rien n’est comparable

Au destin glorieux

Du plus {puissant} {brillant} des Dieux.

ÉPAPHUS

Jupiter pour son fils m’a daigné reconnaître;

On peut douter encor qu’un Dieu vous ait fait naître.

PHAÉTON

C’est le Soleil, vous le savez.

ÉPAPHUS

Votre mère le dit, est-ce assez pour le croire?

PHAÉTON

Osez-vous attaquer ma gloire?

ÉPAPHUS

Défendez-la, si vous pouvez.

PHAÉTON

Vos yeux sont fermés par l’Envie;

Malgré vous ils seront ouverts.

J’espère que le Dieu qui m’a donné la vie

M’avouera pour son fils aux yeux de l’Univers.

SCENE QUATRIEME

PHAÉTON, ÉPAPHUS, MÉROPS, CLIMÈNE, LIBIE,

Les deux Rois tributaires de Mérops, Troupes de Peuples différents,

Troupes de jeunes Égyptiens et de jeunes Égyptiennes, qu’on a pris soin de choisir et de parer magnifiquement pour porter de riches offrandes,

Troupe de Prêtresses de la Déesse Isis

Les jeunes Égyptiens et les jeunes Égyptiennes qui portent les offrandes, approchent du Temple d’Isis en dansant.

MÉROPS

O vous, pour qui l’Amour des plus beaux de ses nœuds

Sut enchanter le Dieu qui lance le tonnerre:

Isis, aimez toujours ce séjour bienheureux.

Le Ciel y fit cesser votre sort rigoureux ,

Lorsque Junon partout vous déclarait la guerre.

Approuvez nos desseins, favorisez nos vœux;

Étendez cet Empire aux deux bouts de la Terre.

MÉROPS et CLIMÈNE

Nous révérons

Votre puissance;

Nous implorons

Votre assistance.

Isis, nous espérons en vous,

Isis, exaucez-nous.

LE CHŒUR DES PEUPLES

Nous révérons

Votre puissance;

Nous implorons

Votre assistance.

Isis, nous espérons en vous,

Isis, exaucez-nous.

LE CHŒUR DES PRETRESSES D’ISIS

Recevez, ô grande Déesse,

Les vœux qu’on vous adresse.

Le Chœur des Peuples et le Chœur des Prêtresses répètent alternativement les vers qu’ils ont chantés.

LE CHŒUR DES PEUPLES

Nous révérons

Votre puissance;

Nous implorons

Votre assistance;

Isis, nous espérons en vous;

Isis, exaucez-nous.

LE CHŒUR DES PRETRESSES D’ISIS

Recevez, ô grande Déesse,

Les vœux qu’on vous adresse.

ÉPAPHUS

Vous qui servez Isis, avez-vous la faiblesse

D’être éblouis de la richesse

Des offrandes qu’on vous fait voir?

Et vous, Divinité dont je tiens la naissance,

Consentez-vous à recevoir

Des dons de la main qui m’offense?

On entend du bruit dans le Temple, et l’on en voit les portes se fermer d’elles-mêmes.

MÉROPS

Dieux! le Temple se ferme!

PHAÉTON

Allons, il faut l’ouvrir.

Les Dieux veulent souvent qu’on ose les contraindre

A recevoir les vœux que l’on doit leur offrir.

CLIMÈNE

Ha! mon fils, arrêtez.

PHAÉTON

Suivez-moi sans rien craindre.

ÉPAPHUS

Vengez-vous, ô puissante Isis,

Vengez-vous, vengez votre fils.

SCENE CINQUIEME

Les portes du Temple s’ouvrent, et ce lieu, qui avait paru magnifique, n’est plus qu’un gouffre effroyable qui vomit des flammes et d’où sortent des Furies et des Fantômes terribles, qui renversent et brisent les offrandes, et qui menacent et écartent l’assemblée. Phaéton s’obstine à demeurer, et Climène ne peut quitter son fils.

SCENE SIXIEME

CLIMÈNE, PHAÉTON

CLIMÈNE

Le Ciel trouble votre bonheur;

Un péril mortel vous menace.

PHAÉTON

L’Envie ose attaquer ma gloire et votre honneur,

C’est l’unique péril dont mon cœur s’embarrasse.

Partagez un affront, dont le seul souvenir

Me fait rougir de honte, et frémir de colère.

Épaphus ose soutenir

Que le Soleil n’est pas mon père.

CLIMÈNE

O Dieux!

PHAÉTON

C’est de vous que j’attends

Des témoignages éclatants

De la grandeur de ma naissance.

Je sens qu’elle est divine, et j’ai dû m’en vanter;

Mais c’est peu que mon cœur m’en donne l’assurance,

Il faut forcer l’Envie à n’en pouvoir douter.

Prenez-en soin, au nom du tendre amour de mère

Qui s’est, en ma faveur, signalé tant de fois;

Au nom de ce qui peut vous plaire;

Au nom du Dieu qui nous éclaire,

De ce Dieu que l’Amour sut ranger sous vos lois.

CLIMÈNE

Mon fils, n’en doutez point, vous confondrez l’Envie,

C’est du Père du Jour que vous tenez la vie;

Vous pouvez vous vanter d’un sort si glorieux.

Vous êtes son fils, je le jure,

Par ce Dieu qui nous voit, qui nous entend des Cieux,

Et par la splendeur vive et pure

Dont il sait obscurcir l’éclat des plus grands Dieux.

Si je soutiens une imposture,

Puisse-t-il pour jamais refuser à mes yeux

La lumière qu’il donne à toute la nature.

Des Vents sortent d’un nuage, et viennent prendre Phaéton pour le conduire au Palais du Soleil.

Ce Dieu semble approuver le serment que je fais;

Il y joindra son témoignage.

C’est lui qui fait sortir ces Vents de ce nuage

Pour vous conduire à son Palais.

PHAÉTON

Ma gloire éclatera de l’un à l’autre pôle;

L’envieux Épaphus se verra démentir,

Je ne puis assez tôt partir.

CLIMÈNE

Allez, mon fils, allez.

PHAÉTON

Je vole.

Les Vents enlèvent Phaéton et le conduisent au Palais du Soleil.

Fin du troisième Acte.

ACTE QUATRIEME

Le Théâtre change, et représente le Palais du Soleil.

SCENE PREMIERE

LE SOLEIL, les Heures du Jour, le Printemps, l’Été,

l’Automne, l’Hiver, Suites des quatre Saisons

LE CHŒUR DES HEURES

Sans le Dieu qui nous éclaire,

Tout languit, rien ne peut plaire.

Chantons, ne cessons jamais

De publier ses bienfaits.

UNE DES HEURES

O Dieu de la clarté, vous réglez la mesure

Des jours, des saisons, et des ans.

C’est vous qui produisez dans les fertiles champs

Les fruits, les fleurs, et la verdure;

Et toute la Nature

N’est riche que de vos présents.

LE CHŒUR DES HEURES et LE CHŒUR DES SAISONS

Sans le Dieu qui nous éclaire

Tout languit, rien ne peut plaire;

Chantons, ne cessons jamais

De publier ses bienfaits.

L’AUTOMNE

C’est par vous, ô Soleil, que le Ciel s’illumine;

Et sans votre splendeur divine,

La Terre n’aurait point de climats fortunés.

La Nuit, l’Horreur, et l’Épouvante

S’emparent du séjour que vous abandonnez;

Tout brille, tout rit, tout enchante,

Dans les lieux où vous revenez.

LES CHŒURS DES HEURES ET DES SAISONS

Sans le Dieu qui nous éclaire,

Tout languit, rien ne peut plaire;

Chantons, ne cessons jamais

De publier ses bienfaits.

LE SOLEIL

Redoublez la réjouissance

Que vous me faites voir.

Phaéton vient ici, c’est mon fils qui s’avance,

Prenez soin de le recevoir.

SCENE SECONDE

LE SOLEIL, PHAÉTON, les Heures du Jour,

les quatre Saisons, Suite des quatre Saisons

Le Printemps et sa Suite dansent, et les autres Saisons chantent avec les Heures, pour témoigner qu’ils se réjouissent de l’arrivée du fils du Soleil dans le Palais de son père.

UNE DES HEURES et LES CHŒURS qui lui répondent

Dans ce palais,

Bravez l’Envie;

Dans ce palais,

Vivez en paix.

Soyez content, tout vous y convie;

Goûtez toujours les biens les plus parfaits;

L’honneur qui suit une illustre vie

Est un bonheur qui ne finit jamais.

Ne tardez pas,

La Gloire est belle,

Ne tardez pas,

Suivez ses pas.

Vous la cherchez, sa voix vous appelle,

Vous êtes fait pour aimer ses appas;

L’amour constant que l’on a pour elle

Porte un grand nom au-delà du trépas.

LES CHŒURS

Dans cette demeure charmante,

Venez jouir d’une gloire éclatante;

Jeune Héros, tout répond à vos vœux,

Venez jouir d’un sort heureux.

LE SOLEIL

Approchez, Phaéton, que rien ne vous étonne:

J’adoucis en ces lieux l’éclat qui m’environne.

Vous soupirez? mon fils, qui peut vous inspirer

Tant de trouble et tant de tristesse?

Le sang qui pour vous m’intéresse,

Vous permet de tout espérer.

PHAÉTON

Ame de l’Univers, Source vive et féconde

De tous les biens du Monde;

Père du Jour, s’il m’est permis

D’oser vous appeler mon père,

Ne me refusez pas le secours que j’espère

Contre mes jaloux ennemis.

Le reproche honteux d’une naissance obscure

M’a fait une cruelle injure;

Au nom de l’amour paternel,

Imposez à l’Envie un silence éternel.

LE SOLEIL

L’Envie accuse à tort Climène.

Vous n’êtes point trompé, j’approuverai sans peine

Le grand nom que vous avez pris;

Ma tendresse pour vous ne craint pas de paraître,

Phaéton, vous êtes mon fils,

Et vous êtes digne de l’être.

Quel gage voulez-vous du sang qui vous fit naître?

Quoi que vous puissiez demander,

Je promets de vous l’accorder.

C’est toi que j’en atteste,

Fleuve noir et funeste,

Que l’éternelle Nuit doit cacher à mes yeux;

J’en jure par l’horreur de tes eaux effroyables,

Styx, ô Styx! dont le nom attesté par les Dieux

Rend leurs serments inviolables.

Tous mes trésors vous sont ouverts,

Tout est permis à votre noble audace.

PHAÉTON

Sur votre char, en votre place,

Permettez-moi d’éclairer l’Univers.

LE SOLEIL

Ah! mon fils, qu’osez-vous prétendre?

PHAÉTON

Si je suis votre fils, puis-je trop entreprendre?

LE SOLEIL

Malgré mon sang, la loi du Sort

Vous assujettit à la Mort.

Vos désirs vont plus loin que la puissance humaine,

C’est trop pour un mortel de tenter un effort

Où les forces d’un Dieu ne suffisent qu’à peine.

PHAÉTON

La Mort ne m’étonne pas,

Quand elle me paraît belle;

Je suis content du trépas

S’il rend ma gloire immortelle.

LE SOLEIL

J’ai fait un indiscret serment.

Voyez mon triste cœur saisi d’étonnement;

De l’amour paternel faut-il un autre gage?

Hélas! ma crainte en dit assez,

Un Dieu tremble pour vous, mon fils, reconnaissez

Votre père à ce témoignage.

PHAÉTON

Je dois, par un courage incapable d’effroi,

Mériter les frayeurs que vous avez pour moi.

LE SOLEIL

Déjà la Nuit descend et fait place à l’Aurore,

Il faut bientôt faire briller mes feux.

Abandonnez un dessein dangereux,

Évitez votre perte, il en est temps encore.

PHAÉTON

Mon dessein sera beau, dussé-je y succomber.

Quelle gloire si je l’achève!

Il est beau qu’un mortel jusques aux Cieux s’élève,

Il est beau même d’en tomber.

LE SOLEIL

Puisque je l’ai juré, je dois vous satisfaire.

Fortune, s’il se peut, prends soin d’un téméraire;

Mon fils veut se perdre aujourd’hui,

Conserve ses jours malgré lui.

LES CHŒURS

Allez répandre la lumière;

Puisse un heureux destin

Vous conduire à la fin

De votre brillante carrière,

Allez répandre la lumière.

Fin du quatrième Acte.

ACTE CINQUIEME

Le Théâtre change, et représente une campagne agréable; la nuit se dissipe insensiblement, et cède au jour qui commence à paraître; Phaéton, assis sur le char du Soleil, s’élève sur l’horizon.

SCENE PREMIERE

CLIMÈNE et un des deux Rois tributaires de Mérops

CLIMÈNE

Assemblez-vous, habitants de ces lieux.

Le sommeil qui ferme vos yeux

Vous retient trop longtemps dans une paix profonde;

Mon fils fait voir qu’il est du sang des Dieux.

Sur le char de son père il brille dans les Cieux.

Que votre zèle me seconde.

Célébrez avec moi son destin glorieux.

Que l’on chante, que tout réponde,

C’est un Soleil nouveau

Qui donne la lumière au monde,

C’est un Soleil nouveau

Qui donne un jour si beau.

CLIMÈNE et LE ROI TRIBUTAIRE DE MÉROPS

C’est un Soleil nouveau

Qui donne la lumière au monde,

C’est un Soleil nouveau

Qui donne un jour si beau.

Climène, transportée de joie, court de tous côtés publier la gloire de son fils. Les Peuples d’Égypte, qui entendent sa voix, s’empressent de la suivre.

SCENE SECONDE

ÉPAPHUS, Troupe de Peuples

qui suivent Climène

ÉPAPHUS

Dieu qui vous déclarez mon père,

Maître des Dieux, c’est en vous que j’espère.

M’abandonnerez-vous au désespoir fatal

De voir triompher mon rival?

On suit les transports de sa mère;

On me méprise, on le révère;

Tout sert à son bonheur, tout irrite mon mal.

Il obtient ce qui m’a su plaire,

Il monte au Ciel, il nous éclaire,

Il me voit accablé d’un tourment sans égal.

Dieu qui vous déclarez mon père,

Maître des Dieux, c’est en vous que j’espère.

M’abandonnerez-vous au désespoir fatal

De voir triompher mon rival?

SCENE TROISIEME

ÉPAPHUS, LIBIE

LIBIE

O rigoureux martyre

De n’oser découvrir de mortelles douleurs!

Mon destin paraît beau, tout le monde l’admire,

Cependant, je soupire,

Je pleure mes malheurs.

Du sévère Devoir le tyrannique empire

Me contraint à cacher mes soupirs et mes pleurs.

O rigoureux martyre,

De n’oser découvrir de mortelles douleurs!

LIBIE apercevant Épaphus

Dieux! Épaphus...

ÉPAPHUS

Belle Princesse...

LIBIE

N’augmentez pas le désordre où je suis.

ÉPAPHUS

Vous me fuyez!

LIBIE

Quelle faiblesse!

Je le devrais; mais je ne puis.

Hélas! en nous voyant, nous redoublons nos peines.

ÉPAPHUS

Que dans mes maux il m’est doux de vous voir!

LIBIE

Je suis à Phaéton par des lois souveraines.

ÉPAPHUS

Vous n’êtes pas encore en son pouvoir.

Mon père est Souverain du Ciel et de la Terre,

Espérons au secours qu’il peut nous réserver.

Plus mon rival s’empresse à s’élever,

Plus son orgueil l’approche du tonnerre.

LIBIE

Je n’ose plus songer qu’à suivre mon devoir;

L’espérance nous est ravie.

ÉPAPHUS

Ah! si vous m’ôtez tout espoir,

Vous m’ôterez la vie.

J’ose attendre du Sort quelque heureux changement,

L’Amour doit espérer jusqu’au dernier moment.

LIBIE

Notre disgrâce est certaine,

Vous espérez vainement.

ÉPAPHUS

L’espérance la plus vaine

Flatte un malheureux amant.

LIBIE et ÉPAPHUS

Hélas! une chaîne si belle

Devait être éternelle!

Hélas! de si tendres amours

Devaient durer toujours!

SCENE QUATRIEME

MÉROPS, CLIMÈNE, les deux Rois tributaires de Mérops, Troupes de divers Peuples, Troupes de Pasteurs Égyptiens et de Bergères Égyptiennes

Mérops et Climène invitent leur Suite à se réjouir de la gloire du Héros qui doit être un jour Roi d’Égypte.

Les Pasteurs Égyptiens et les Bergères Égyptiennes dansent, et les autres Peuples chantent.

MÉROPS et CLIMÈNE

Que l’on chante, que tout réponde,

C’est un Soleil nouveau

Qui donne la lumière au monde;

C’est un Soleil nouveau

Qui donne un jour si beau.

LE CHŒUR

Que l’on chante, que tout réponde,

C’est un Soleil nouveau

Qui donne la lumière au monde;

C’est un Soleil nouveau

Qui donne un jour si beau.

MÉROPS et CLIMÈNE

Jamais le céleste Flambeau

Ne sortit si brillant de l’Onde.

C’est un Soleil nouveau

Qui donne la lumière au monde;

C’est un Soleil nouveau

Qui donne un jour si beau.

LE CHŒUR

Que l’on chante, que tout réponde,

C’est un Soleil nouveau

Qui donne la lumière au monde;

C’est un Soleil nouveau

Qui donne un jour si beau.

Les Pasteurs Égyptiens et les Bergères Égyptiennes témoignent leur joie en dansant, et une de ces Bergères chante.

UNE BERGERE ÉGYPTIENNE

Ce beau jour ne permet qu’à l’Aurore

De s’occuper à répandre des pleurs.

Que d’éclat! que de vives couleurs!

Mille fleurs vont éclore;

Tout charme nos cœurs;

Il naîtra plus encore

D’Amours que de fleurs.

L’Amour plaît, je consens qu’il m’enchante

Lorsqu’il suivra les Ris et les Jeux ;

Mais s’il me tourmente

Je romprai ses nœuds.

Un amant qui toujours soupire

Doit alarmer.

Ce n’est que pour rire

Qu’on doit former

Le dessein d’aimer.

Jeunes cœurs qui cherchez à vous rendre,

N’aimez pas tant;

Un amour trop tendre

N’est jamais content.

Puisqu’il faut qu’une chaîne vous lie,

Ne faut-il pas choisir un nœud charmant?

Moquons-nous de souffrir constamment;

On doit rendre la vie

Plus douce en aimant,

Ce n’est qu’une folie

D’aimer son tourment.

L’Amour plaît, je consens qu’il m’enchante

Lorsqu’il suivra les Ris et les Jeux;

Mais s’il me tourmente

Je romprai ses nœuds.

Un amant qui toujours soupire

Doit alarmer.

Ce n’est que pour rire

Qu’on doit former

Le dessein d’aimer.

Jeunes cœurs qui cherchez à vous rendre,

N’aimez pas tant;

Un amour trop tendre

N’est jamais content.

SCENE CINQUIEME

THÉONE, MÉROPS, CLIMÈNE,

les deux Rois tributaires de Mérops, Troupes de divers Peuples,

Troupes de Pasteurs Égyptiens et de Bergères Égyptiennes

THÉONE

Changez ces doux concerts en des plaintes funèbres.

L’instant fatal arrive où d’épaisses ténèbres

Couvriront pour jamais le Soleil qui nous luit;

Phaéton va tomber dans l’éternelle Nuit.

Mon père m’en assure, et la pitié rappelle

Un trop fidèle amour pour un amant sans foi.

Hélas! je ne vois plus sa trahison cruelle,

Son funeste péril est tout ce que je vois.

CLIMÈNE

Une effroyable flamme

Se répand dans les airs.

THÉONE

Que la crainte trouble mon âme!

Phaéton, tu te perds.

Tu vas embraser l’Univers.

LE CHŒUR

Dieux! quel feu vient partout s’étendre!

Dieux! tout va se réduire en cendre!

Quelle ardeur pénètre en tous lieux!

Où fuirons-nous? ô justes Dieux!

SCENE SIXIEME

LA DÉESSE DE LA TERRE, THÉONE, MÉROPS, CLIMÈNE,

les deux Rois tributaires de Mérops, Troupes de divers Peuples,

Troupes de Pasteurs Égyptiens et de Bergères Égyptiennes

LA DÉESSE DE LA TERRE

C’est votre secours que j’implore,

Jupiter, sauvez-moi du feu qui me dévore.

Ai-je pu mériter un si cruel tourment?

Ah! s’il faut qu’un embrasement

A la fin me réduise en poudre,

Que je ne brûle au moins que du feu de la foudre.

Grand Dieu, ne me refusez pas

La gloire de périr d’un coup de votre bras.

Roi des Dieux, armez-vous, il n’est plus temps d’attendre,

Tout l’Empire qui suit vos lois

Bientôt ne sera plus qu’un vain monceau de cendre.

Les fleuves vont tarir; les villes et les bois,

Les monts les plus glacés, tout s’embrase à la fois,

Les Cieux ne peuvent s’en défendre...

Ah! je sens suffoquer ma voix;

Avec peine je respire,

Au milieu de tant de feux.

Il faut que je me retire

Dans mes antres les plus creux.

SCENE SEPTIEME

PHAÉTON, MÉROPS, CLIMÈNE, LIBIE, THÉONE,

les deux Rois tributaires de Mérops, Troupes de divers Peuples,

Troupes de Pasteurs Égyptiens et de Bergères Égyptiennes

Phaéton paraît en désordre sur le char du Soleil, qu’il ne peut plus conduire.

LE CHŒUR

O Dieu qui lancez le tonnerre,

Hâtez-vous de sauver la Terre.

Nous brûlons, nous allons périr;

Venez, ô Jupiter, venez nous secourir.

SCENE HUITIEME ET DERNIERE

JUPITER, PHAÉTON, MÉROPS, CLIMÈNE, LIBIE, THÉONE,

les deux Rois tributaires de Mérops, Troupes de divers Peuples,

Troupes de Pasteurs Égyptiens et de Bergères Égyptiennes

JUPITER

Au bien de l’Univers ta perte est nécessaire.

Sers d’exemple aux Audacieux;

Tombe avec ton orgueil, trébuche, téméraire,

Laisse en paix la Terre et les Cieux.

Jupiter foudroie Phaéton et le fait trébucher.

CLIMÈNE et THÉONE

O sort fatal!

MÉROPS, LIBIE, et LE CHŒUR

O chute affreuse!

O témérité malheureuse!

Fin du cinquième et dernier Acte.