Charpentier, François

Le passage ci-dessous est extrait du Carpentariana manuscrit de François Boscheron, qui avait publié en 1724 Carpentariana, ou Remarques d’histoire, de morale, de critique, d’érudition et de bons mot, de M. Charpentier de l’Academie Françoise (Paris, Nicolas le Breton, fils). Selon William Brooks, « le compilateur a déniché [ces extraits] dans les papiers de Charpentier qui lui restaient après la finalisation de la version publiée » (François Boscheron, p. 334-335). A priori, Boscheron cite Charpentier textuellement, mais il est possible que le compilateur ait mis un peu du sien dans le premier paragraphe ; le passage "M. Furetière l'a faussement blamé [...]" est sans doute pris directement dans les papiers de l'Académicien.


L’Envie que la Reputation de Quinault a causee à quelques écrivains de son siecle leur a fait prendre la plume contre luy avec trop de chaleur. Le mépris qu’ils ont affecté contre ses écrits, a porté plusieurs autres à le peindre comme le genie le plus aisé de parnasse et le plus sincere auprès des dames. Ce qu’une muse moderne a exprimée [sic] dans ces quatre vers :

Quinault des plaisirs le soutien

Et les delices de la France

Vous donnera pour penitence

D’aimer longtems sans esperance.

M. de Benserade a répondu à ces quatre vers par les deux que voici :

Quinaut sera toujours Quinaud

C’est-à-dire doux, tendre & Chaud.

M. Furetière l’a faussement blamé d’ignorance, ses railleries ne sont pas vraies, Quinault savait le latin, je lui ai même entendu dire à notre academie des devises de sa façon, pour le Trésor Royal, on en a gravé depuis quelques jours une de lui qui se voit avec d’autres de moi, de M. le duc de St Aignan, de M. de la Ferrière, et de Santeüil, je sais encore de Quinault une traduction d’une Ode d’Horace lue à l’Académie françoise.


François Charpentier (1620-1672) était le collègue de Quinault dans les deux Académies. Dans la Petite Académie, dont Charpentier était un des membres fondateurs, ils ont collaboré souvent sur des médailles et des jetons, comme celui pour le Trésor Royal mentionné dans le Carpentariana manuscrit. En 1683, après la mort de Colbert, Quinault et Charpentier ont informé le nouveau ministre de l’état de la Petite Académie. À cette époque il était question des descriptions des peintures dans la Galerie des Glaces à Versailles, et on aimerait savoir exactement quel rôle joua Quinault dans leur élaboration. Charpentier en avait déjà fait en français, après ceux de Tallemant en latin, et Racine, Boileau et Rainssant allaient les revoir plus tard. Deux sources d’avril 1686 disent que Quinault allait travailler à ces inscriptions, mais aucune trace de ses travaux ne nous est parvenue. Il est possible qu’il ait été trop malade.

 

Dans l’Académie Française, Quinault et Charpentier ont complimenté ensemble Bussy Rabutin sur son retour de l’exil, en janvier 1682, et en décembre 1684 les deux – avec plusieurs autres académiciens – ont essayé de montrer à Furetière qu’il avait tort de publier son propre dictionnaire.

 

Leurs relations avec l’auteur du dictionnaire étaient compliquées. Selon Furetière, Charpentier insultait Quinault :

Il n’y a eu personne exempt de grosses paroles, surtout quand il a été directeur ; et j’admirai un jour la patience de Mr Quinault en cette place, qui souffrit en bon chrétien l’insulte que lui fit Mr Charpentier, en lui disant qu’on devoit s’étonner qu’avec si peu de merite et une si basse naissance il eût fait une si grande fortune. (Factum II, dans Factums, éd. Asselineau I, p. 196)

Cependant, on lit dans le Carpentariana manuscrit que Charpentier défendait Quinault contre les attaques de Furetière, qui étaient nombreuses. Comme celui-ci s’était fâché avec presque tous les Académiciens, il semble plus prudent de croire Charpentier.


Dans sa Vie manuscrite (1722), p. 38, Boscheron suit Charpentier de très près quand il insiste sur les connaissances de Quinault. Dans la marge, il met la date de 1681 à côté de la mention de la traduction d’une ode d’Horace et celle de 1682 deux lignes plus bas quand il parle de la devise pour le Trésor Royal. Il s’agit probablement des jetons gravés en janvier 1683.