Gustave Chouquet

Histoire de la musique dramatique en France depuis ses origines jusqu'à nos jours

Paris, Firmin Didot, 1873

Chouquet (1819-1886) était parolier aussi bien qu'historien. Parmi ses ouvrages, on peut citer un catalogue du musée du Conservatoire National de Musique et un livre sur les Hotteterre.

Son Histoire de la musique dramatique résume bien ce qu'on pensait et ce qu'on savait de Quinault deux siècles après ses premiers livrets. Le répertoire à la fin est assez complet, avec des noms de chanteurs et de danseurs, des reprises et des parodies, et quelques commentaires sur les meilleurs morceaux.

[Chapitre VI]

[p. 112]

[…] Le premier, il [Quinault] comprit que, à cause de sa destination spéciale, l’opéra exige une autre coupe que celle des pièces où il n’entre que du dialogue. Versificateur harmonieux, élégant et facile, auteur versé dans la science et dans la pratique du théâtre, ayant enrichi déjà la scène de conceptions applaudies, — entre autres la Mère coquette (1664), jolie comédie qui longtemps est restée au répertoire, et la Comédie sans comédie (1654), type de cette variété malheureuse d’œuvres dramatiques qui forment plusieurs pièces en une seule, — Ph. Quinault résolut de consacrer ses brillantes facultés à un genre qui, de son temps, manquait encore à notre littérature. Il commença par imiter les Italiens et par combiner l’élément comique avec l’élément tragique ; mais il s’aperçut vite que le goût français repousse ce mélange, et il y renonça pour toujours après la représentation d’Alceste. Sa vive imagination et son âme aimante lui inspirèrent des drames lyriques d’une unité rigoureuse et cependant d’une grande richesse de détails. Ses poëmes intéressants et variés témoignent, en outre, d’un remarquable sentiment

 

[p. 113]

des beautés musicales, et nous les trouvons d’autant plus dignes d’admiration que nous ne saurions oublier dans quelles circonstances ils ont été composés. Quinault n’avait pas à se préoccuper simplement des exigences d’une scène spéciale : il était forcé de se plier aux fantaisies d’un souverain encore plus absolu que S. M. le Public. Il lui fallait d’abord exposer à Louis XIV le sujet et le plan de ses fables dramatiques : le monarque choisissait, parmi les scénarios qu’on soumettait à son approbation, celui qu’il jugeait le meilleur ou qu’il considérait comme se prêtant le mieux à une mise en scène magnifique et, partant, comme le plus digne d’être représenté sur le théâtre des Tuileries ou de Versailles. Une fois écrit en vers, ce livret d’opéra subissait la censure de l’Académie des inscriptions, si nous nous en rapportons à de Boze (1), ou celle de savants littérateurs désignés par Colbert, si nous en croyons de Fresneuse (2). Lully, fort heureusement, ne tenait point compte des critiques de ces censeurs : plus d’une fois il employa des vers qu’on avait condamnés, et il n’hésita pas à demander à son poëte préféré des additions ou des modifications qu’il croyait indispensables. Grâce au parfait accord d’idées qui régnait entre eux, l’auteur et le musicien ont triomphé de tous les obstacles qu’ils avaient à vaincre, et les chefs-d’oeuvre qu’ils nous ont légués passent avec raison pour des modèles de composition lyrique qu’un écrivain lira toujours avec fruit.

  Aux sujets qu’a traités Quinault, à la coupe même de ses opéras, on s’aperçoit que l’Académie de musique inaugura ses représentations au lendemain des plus vifs succès du ballet de cour. Sur ce royal théâtre, tout nous vient rappeler les divertissements aristocratiques : prologue indépendant de la pièce, tragédie reposant sur une donnée de la fable ou fondée sur le merveilleux, jeu des machines, éclat pompeux du spectacle et danses introduites dans chaque acte.

  Le prologue forme une cantate dramatique à plusieurs personnages et avec chœurs, le plus souvent. Il recourt volontiers à l’allégorie (3) et il paraît avoir pour but la louange du roi, ainsi qu’on s’en pourra convaincre par les vers suivants :

 

(1) Histoire de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, t. 1, pp. 3-4.

(2) Comparaison de la musique italienne et de la musique française, t. II, p. 214.

(3) « Non-seulement le prologue des actions en musique peut être une allégorie, mais toute la pièce entière, parce que ces représentations sont des peintures parlantes... » (V. Ménestrier, Des Représentations en musique, p. 219.)

 

[p. 114]

Le maitre de ces lieux n’aime que la victoire,

Il en fait ses plus chers désirs :

Il néglige ici les plaisirs,

Et tous ses soins sont pour la gloire (1).

Publions en tous lieux

Du plus grand des héros la valeur triomphante,

Que la terre et les cieux

Retentissent du bruit de sa gloire éclatante (2) !

Muses, préparons nos concerts.

Le plus grand roi de l’univers

  Vient d’assurer le repos de la terre :

Sur cet heureux vallon il répand ses bienfaits.

Après avoir chanté les fureurs de la guerre,

Chantons les douceurs de la paix.

. . . . . . . .

Chantons le plus grand des mortels,

  Chantons un roi digne de nos autels (3) !

 

  A ces éloges hyperboliques, à ces allusions aux événements contemporains, on reconnaît le ton ordinaire de la cantate officielle, dont le cadre, l’esprit et le style n’ont guère varié depuis le règne « du plus fameux de tous les rois ».

  Le prologue, petite pièce avant la grande, était suivi d’une tragédie en cinq actes mêlée de divertissements. Le sujet du drame, emprunté soit à la mythologie, soit à quelque poëme où le merveilleux joue un rôle considérable, permettait de peindre sous des noms héroïques une société idolâtre d’elle-même. Quinault se montre un trop habile flatteur de Louis XIV pour ne pas bien connaître l’âme humaine et toutes les passions qui l’agitent. Il excelle surtout à rendre le langage d’un amour ardent ou tendre, timide ou violent : sauf Racine, aucun poëte du dix-septième siècle n’a su, comme lui, excuser les faiblesses du cœur et les ennoblir. Aussi les discours amoureux occupent-ils la première place dans son œuvre et lui fournissent-ils le thème habituel de ses récits,

 

(1) Prologue de Thésée.

(2) Prologue d’Isis.

(3) Prologue de Bellérophon (1679, après la paix de Nimègue).

 

[p. 115]

de ses airs et de ses duos. Il a soin néanmoins de rompre avec art la monotonie qui résulterait de ce retour constant aux idées d’un même ordre, en faisant intervenir à propos le chœur au milieu de l’action dramatique et en imaginant des incidents qui amènent les surprises de la mise en scène et le ballet placé dans chaque acte.

  Miroir charmant où le roi et les personnages de sa cour contemplaient leur image embellie, les opéras de Quinault et Lully nous semblent la vivante expression de la ferveur monarchique qui animait la société française au temps où ils furent écrits. Ils ont un autre mérite, aux yeux de celui qui étudie l’histoire de la musique : ils marquent l’époque où les deux courants qui jusque-là avaient alimenté l’art musical sans se confondre, — le courant scientifique et religieux d’une part, et, de l’autre, le libre courant populaire, — se sont enfin mêlés et d’une façon si complète, que les chants de l’église ne diffèrent point, quant à la forme, de ceux du théâtre.

  Cette similitude de style et de procédés qu’on remarque dans les œuvres religieuses et dans les compositions théâtrales du règne de Louis XIV, ne doit point nous rendre injuste envers les musiciens français du dix-septième siècle. Nous n’appellerons pas leurs tragédies lyriques une longue et ennuyeuse psalmodie, laissant les systématiques dédains aux écrivains superficiels qui s’inspirent de Castil-Blaze ; mais, avec un maître éminent et regretté, nous reconnaîtrons que « il y a plus de musique dans un des finales d’une œuvre moderne que dans les cinq actes d’un opéra de Lully (1). » Cela s’explique sans peine : l’ouverture, l’air développé et le finale restaient encore à créer, et l’auteur de la première Armide n’eut, point à surmonter ces trois difficultés, les plus grandes peut-être que l’on rencontre dans la musique dramatique.

  En effet, la courte symphonie qui sert d’introduction à ses opéras ne saurait être considérée comme une ouverture caractéristique, puisqu’elle est placée avant un prologue indépendant et non pas avant la tragédie, et qu’elle est, par conséquent, sans aucun rapport direct avec l’action du drame. Simple prélude instrumental, elle avait pour objet principal de calmer l’impatience du public, obligé d’attendre la venue ou le caprice du roi-soleil.

  Quant aux airs de Lully, nous savons quelles différentes formes et

 

(1) F. Halévy, Souvenirs et Portraits, p. 19.

 

[p. 116]

quelles dimensions restreintes il leur a donnée. Complétons nos observations précédentes sur le caractère des œuvres lyriques de ce compositeur, en ajoutant que les récits occupent une place importante dans tous ses opéras et en rappelant que les acteurs de son théâtre, dépourvus pour la plupart d’une bonne éducation musicale, déclamaient, à vrai dire, bien plutôt qu’ils ne chantaient ; aussi n’observaient-ils guère la mesure, et par leur débit emphatique ou par leur déclamation précipitée, allongeaient-ils ou raccourcissaient-ils à leur volonté la durée du spectacle. Ce n’était que dans les ensembles des duos et des trios, dans les chœurs et dans les airs de ballet qu’on obéissait docilement aux lois du rythme.

  Enfin, si tous les morceaux du surintendant de la musique de Louis XIV — airs, duos, trios, chœurs et danses — sont composés de phrases symétriques et musicalement agencées ; s’ils présentent un enchaînement d’idées naturel et logique, un ordre architectural régulier, on peut dire que l’art des savants développements, si utile dans la construction d’un finale, y apparaît à peine. On commence pourtant à l’entrevoir dans les divertissements et plus particulièrement dans les chacones, sorte de finale dansé au son des instruments et sans l’intervention des voix.

 

[p. 317]

RÉPERTOIRE GÉNÉRAL

DU

THÉÂTRE DE L'ACADÉMIE DE MUSIQUE

[…]

Les Fêtes de l'Amour et de Bacchus, past., 3 a. avec prol. — MOLIÈRE, BENSERADE, PÉRIGNY et QUINAULT ; musique de DESBROSSES et LULLY : 15 nov. 1672.

   Le ballet était de Desbrosses. Les décors et les machines de Vigarani.

   Reprises de ce pastiche : 1689-96; 1706, 1716. Divertissement tiré du prologue et du 2e acte de cette pastorale pour terminer le Triomphe de l'Harmonie : 13 fév. 1738.

   Le trio : Dormez, dormez, beaux yeux, faisait l'admiration des contemporains de Lully.

 

[p. 318]

Cadmus et Hermione, trag. lyr., 5 a. avec prol. — QUINALUT ; LULLY : 1er fév. (selon de Léris), 11 fév. (d'après le catalogue de Soleinne) 1673.

   Les acteurs du prologue étaient Mlle Cartilly, Clédière et Miracle. Les rôles de la tragédie étaient ainsi distribués : Beaumavielle (Cadmus), Mlle Brigogne (Hermione), Mlle Cartilly (la confidente), Clédière (la nourrice), Rossignol (Draco).

   Reprises : 1678-79-90-91, 1703-11 et 1737. Lors de cette dernière reprise, l'Opéra-Comique en donna une parodie sous le titre de Pierrot Cadmus.

 

Alceste, ou le Triomphe d'Alcide, trag. lyr., 5 a. et prol. — QUINAULT ; LULLY : 2 janv. 1674.

  Les rôles en furent chantés par Mlle Saint-Christophe (Alceste), Mlle Beaucreux (Céphise), Clédière (Admète) et Beaumavielle (Alcide). — Dans le ballet dansa Pécourt, qui devait acquérir plus de réputation encore que son maître Beauchamps.

   Reprises : 1678-82; 1706-16-28 ; 1739 et 1757. Chacune de ces trois dernières reprises inspira une parodie; celle de Dominique et Romagnési obtint beaucoup de succès.

 

Thésée, trag. lyr., 5 a. et prol. — QUINAULT ; LULLY : 11 janv. 1675. — Immense succès.

   Représenté d'abord à Saint-Germain en Laye, cet opéra ne fut donné à Paris qu'après les fêtes de Pâques 1675.

   Acteurs du prologue : Marotte, Lanneau, Lagrille, Godonesche et Dauphin ; Mlles Bony, Piesche, Beaucreux et Laborde. — La tragédie fut chantée par Mlle Aubry (Églé), Mlle Brigogne (Cléone), Morel (Arcas), Mlle Verdier (la Prêtresse), Gaye, basse (Egée), Mlle Saint-Christophe (Médée) ; Mlle Beaucreux (Dorine) ; Clédière (Thésée) et Mlle des Fronteaux (Minerve).

   Berain, dessinateur du roi, donna les dessins des costumes et des coiffures. — Beauchamps et d'Olivet composèrent les ballets.

   Reprises : 1677-79-88-98 ; 1707-20-29-44-54 et 1765.

   Parodie de Favart et Laujon.

   Mondonville et Gossec ont remis en musique Thésée (1767 et 1782) et n'ont pas réussi à faire oublier l'œuvre de Lully.

 

Le Carnaval, mascarade en 9 entrées, avec prol. — BENSERADE, MOLIÈRE, LULLY et QUINAULT ; musique de LULLY : 17 oct. 1675.

   On retrouve dans ce pastiche trois scènes du Carnaval Mascarade et une scène des Muses, de Benserade ; plusieurs entrées du Bourgeois gentilhomme et le ballet de Pourceaugnac, de Molière. Les paroles de la 2e entrée (Barbacola) étaient de Lully.

   Reprises : 1692 et 1700, — En 1716 on en a tiré l'acte de Pourceaugnac, qui reparut en 1730.

 

Atys, trag. lyr., 5 a. et prol.— QUINAULT ; LULLY : 10 janv. 1676.

   Dans le prologue parurent Mlles Verdier (Flore), Beaucreux et des Fronteaux ; Beaumavielle, La Grille et les danseurs Bouteville et Pécourt. — Les rôles de la tragédie furent remplis par Clédière (Atys), Morel, Mlles Aubry (Sangaride), Bri-

 

[p. 319]

gogne (Doris), Saint-Christophe (Cybèle) et Bony, la basse Gaye et autres chanteurs secondaires.

   Dans le ballet composé par Beauchamps et d'Olivet, débuta le célèbre danseur L'Étang, le cadet.

   On admira particulièrement le 1er acte, où se trouve la belle scène d'Atys et de Sangaride.

   Cet opéra favori de Louis XIV et de Mme de Maintenon fut repris en 1678-82- 89-99 ; 1708-9-25-38 et 1740. Il reparut en 1780 avec de la musique de N. Piccinni.

   On en a fait sept parodies, dont deux en 3 a. : l'une de Dominique (1710), l'autre de Fuzelier et Dorneval (1726).

 

Isis, trag. lyr., 5 a. et prol. — QUINAULT ; LULLY : 5 janv. 1677.

   Cette tragédie lyrique, qu'on surnomma « l'opéra des musiciens, » fut chantée par Gaye, Langeais (ténor), Mlle Aubry (Io), Mlle Sainte-Colombe, Clédière (Mercure), Beaumavielle (Jupiter), Mlle Beaucreux (Iris), Mlle Sainte-Christophe (Junon), Mlle Brigogne (Hébé) Morel, Mlle Verdier (Syrinx), Godonesche (Pan), Ribon, Forestier et Mlle Bony.

   Ballets de Beauchamps et d'Olivet. — Dessins de Berain.

   Reprises : 1704-17 et 1732.

   La Vache Io ; A fourbe, fourbe et demi, parodies.

   Le trio des Parques est resté célèbre. La plainte de Pan (a. III, sc. vi) mérite aussi d'être mentionnée.

 

Psyché, trag. lyr., 5 a. et prol. — Th. CORNEILLE et FONTENELLE; LULLY : 9 avril 1678.

   Paroles et musique furent composées en trois semaines.

   A la 1re reprise de cet ouvrage, en 1703, les rôles de Vénus et de Psyché furent interprétés par Mlles Maupin et Desmatins ; en 1713, ils furent remplis par Mlles Heusé et Journet.

 

Bellérophon, trag. lyr., 5 a. et prol. — Th. CORNEILLE et FONTENELLE ; LULLY : mardi 31 janv. 1679.

   Quinault a secondé Th. Corneille dans la composition de cet opéra, et le rôle d'Amisodar tout entier est de Fontenelle.

   Les rôles de Jobate, Sthénobée, Philonoé, Bellérophon et d'Amisodar furent confiés à Beaumavielle, Mlles F. Christophe et Aubry ; Clédière et Nouveau aîné.

   Reprises : 1680-1705-18 et 1728.

   Arlequin Bellérophon, parodie de Dominique et Romagnési : 7 mai 1728.

 

Proserpine, trag. lyr., 5 a. et prol. — QUINAULT; LULLY : 15 nov. 1680.

   Ce remarquable ouvrage fut représenté d'abord à Saint-Germain devant Louis XIV et sa cour, le 3 fév. 1680 ; Mlle Ferdinand chanta le prologue (la Paix) et remplit le rôle d'Aréthuse. A Paris, Louison Moreau parut dans le prologue, et Marthe le Rochois fit sensation en jouant le personnage d'Aréthuse. Mlles Saint-Christophe et Aubry, le ténor Duménil, Beaumavielle et Dun (basse) figuraient Cérès, Proserpine, Alphée, Pluton et Ascalaphe.

 

[p. 320]

   Berain succède à Vigarani et compose les dessins des machines, des décorations et des costumes de cet opéra. Le palais de Pluton et le décor charmant des Champs-Élysées, peints par Rousseau, sont fort admirés.

   Reprises : 1681-99 ; 1715-27-41 et 1758.

   En 1741, Favart en a donné une fort agréable parodie, sous le titre de Farinette.

   On remarque dans cet opéra un duo de basses : l'Amour comblé de gloire (a. II, sc. vii), le premier et unique duo de ce genre qu'ait écrit Lully.

 

Le Triomphe de l'Amour, ballet en 20 entrées. — BENSERADE et QUINAULT ; LULLY : mardi, 15 avril 1681, et non le 6 mai, comme l'ont écrit les frères Parfaict et de Léris.

   Machines de Rivani, qui imagine d'élever sur la scène un double théâtre.

   Ce ballet, dansé pour la première fois à Saint-Germain, le 21 janv. 1681, fut repris en janvier 1682 et en 1696.

   Le 11 sept. 1705, il reparut réduit en 4 entrées, précédées d'un prologue, par Danchet et Campra, et, le 26 nov. 1705, on le donna avec un prologue nouveau et une 5e entrée.

   C'est dans ce ballet que Lully introduisit des danseuses sur le théâtre, —innovation très-goûtée du public. Parmi ces ballerines on remarqua Mlle. de la Fontaine, Pesant, Carré et la petite Leclerc.

 

Persée, trag. lyr., 5 a. et prol. — QUINAULT; LULLY : 17 avril 1682.

   Les rôles de Céphée, Phinée, Persée, Méduse, de Mérope et Andromède eurent pour interprètes : Dun, Beaumavielle, Duménil, Desvoyes, Marthe le Rochois et Mlle Aubry. La petite Desmatins, nièce de Beauchamps, alors âgée de douze ans, chanta et dansa avec succès dans cet opéra, où le danseur Pécourt se fit vivement applaudir.

   Reprises : 1687, 1703-10-22-23-37 et 1746.

   Des quatre parodies de cet opéra, celle de Fuzelier (Arlequin Persée, 1722) passe pour la meilleure.

   Parmi les morceaux les plus mélodieux de cet ouvrage, citons le trio : 0 dieux! qui punissez l'audace et l'évocation : Hymen, ô doux hymen! sois propice à nos vœux ; rappelons parmi ceux qu'on trouvait alors travaillés le début du 3e acte, le chœur : Descendons sous les ondes et le duo entre Phinée et Mérope (IVe a., sc. ii), et signalons surtout aux musiciens le monologue de Méduse et la scène des Gorgones.

 

Phaéton, trag. lyr., 5. a. et prol. — QUINAULT ; LULLY : 27 avril 1683.

   Cet ouvrage inégal fut joué d'abord à Versailles devant le roi, le 6 janv. 1683.

   La blonde et belle Fanchon Moreau débute à l'âge de quinze ans dans le prologue de Phaéton.

   Reprises : 1692, 1702-10-21-30 et 1742.

   En novembre 1721, le roi de France se rend à la représentation publique de cet opéra : Louis XV n'avait jamais encore assisté à un pareil spectacle. Palaprat, l'abbé Macharti, Dominique et Romagnési, Riccoboni, ont fait repré-

 

[p. 321]

senter des parodies de Phaéton, que les contemporains de Lully avaient surnommé l'opéra du peuple.

   Le duo Que mon sort serait doux et le célèbre duo du 5e acte Hélas! une chaîne si belle... sont restés les morceaux les plus aimés de cet ouvrage.

 

Amadis de Gaule, trag. lyr., 5 a. et prol. — QUINAULT ; Lully : 14 janv. (secrétaire de Lully), 18 janv. 1684 (frères Parfaict).

   Les rôles d'Amadis, de Florestan, Arcalaüs, Oriane, Corisandre et Arcabonne, eurent pour interprètes Duménil, Dun, Beaumavielle, Mlles F. Moreau, Desmatins et Marthe le Rochois, qui remporta un double succès comme tragédienne et comme cantatrice.

   Berain imagina de cacher les vilains bras de Marthe le Rochois au moyen de longues manches, nommées depuis manches Amadis.

   Reprises : 1687, 1701-7-18-31-40-59 et 1771.

   Regnard, sous le titre de la Naissance d'Amadis (10 fév. 1694), donna la première des cinq parodies de cet acte.

   Parmi les morceaux les plus goûtés d'Amadis de Gaule, mentionnons l'air : Bois épais, redouble ton ombre, et la chacone du 5e acte.

 

Roland, trag. lyr., 5 a. et prol. — QUINAULT, Lully : le 8 février 1685, comme on l'a toujours indiqué jusqu'à présent, ou le jeudi 8 mars 1685, selon l'Histoire de l'Opéra précitée.

   Représenté à Versailles le 8 janvier 1685 avant d'être joué à Paris, Roland eut pour principaux interprètes : Beaumavielle (Roland), Duménil (Médor), et Mlle le Rochois (Angélique).

   Cet ouvrage a été repris six fois : en 1705-9-16-27-43 et 1755, et il a inspiré cinq parodies.

 

Idylle sur la Paix, divertissement de J. RACINE ; LULLY: 1685.

   On l'appelle souvent l'Idylle de Sceaux, parce que ce divertissement fut donné à Sceaux, avant d'être représenté à Paris.

   Reprise en 1689.

 

L'Églogue de Versailles, divertissement de QUINAULT ; LULLY : 1685.

   Il fut représenté à Versailles dès 1668 et Louis XIV y figura parmi les nymphes dansantes.

   Il portait d'abord le titre de la Grotte de Versailles, qu'il reprit en 1696, 1700 et 1717.

 

Le Temple de la Paix, ballet en 6 entrées. — QUINAULT ; LULLY : 12 sept. 1685.

   Il n'a jamais été repris.

 

Armide et Renaud, trag. lyr., 5 a. et prol. — QUINAULT ; LULLY : 15 fév. 1686. — Grand succès.

   Les rôles d'Armide, de Sidonie et Phénice, eurent pour interprètes Marthe le Rochois, Mlles F. Moreau et Desmatins; ceux d'Hidraot, de Renault et de la Haine furent remplis par Dun, Duménil et Frère.

 

[p. 322]

   Ce bel ouvrage, le dernier que Phil. Quinault écrivit pour le théâtre, a été repris huit fois : en 1688, 1703-13-14-24-46-47 et 1761, et il a été parodié trois fois. On l'appela longtemps l'opéra des dames, et c'est, au point de vue du style, le plus égal, le plus heureux de tous les ouvrages de Lully.